Les Bouches-du-Rhône ne manquent pas d'Anticor !
La matière ne manque certes pas. Mais, dans le « 13 », il n’y a pas une mais 3 associations anti-corruption : Sos Corruption pilotée par l’ancien « patron » du groupe local d’Anticor, Jean Sansone, Ethicpol, montée par d’autres du « GL 13 », et Anticor en tant que telle. Entre les trois, c’est loin d’être cordial…
En Paca, Anticor, on connaît (sa cofondatrice Séverine Tessier a des attaches à Nice). Ses crises aussi, notamment avec l’ancien président Jean-Christophe Picard, capable de faire le grand écart entre le très à droite Olivier Bettati et, aux municipales, l’écolo-libéral Jean-Marc Governatori.
Sa démission de la présidence d’Anticor attisera tensions et appétits. En attente du renouvellement par Matignon de son agrément, l’association, présidée par Me Elise Van Beneden, ne se remet guère de la polémique autour de son mécène, Hervé Vinciguerra, et ses 89 000 euros de don. Car sa fortune, il l’a placée dans des paradis fiscaux. Mais aussi dans des firmes israéliennes de cyber-sécurité (dont celle du logiciel espion Pegasus). Et d’avoir voulu en même temps soutenir le média de Denis Robert Blast… dont Van Beneden est administratrice.
Insultes et exclusions
Une affaire, dixit le rapport moral d’Anticor, loin d’être finie. Et qui ne sera pas ici sans conséquence. Tout semblait pourtant jusqu’à peu aller pour le mieux, le « GL 13 » ayant même été pressenti – avec ses 200 adhérents et ses dizaines de dossiers – pour organiser les universités 2021 ! A sa tête, Jean Sansone, une « grande gueule » qui a fait ses armes avec sa structure Cabriès Défense Développement, et Bernard Fraudin, un ex-sous-préfet chargé lui du « pôle juridique ».
Mais, très vite, rien ne va plus. Début 2021, Fraudin démissionne de son poste de « co-référent ». Son binôme ayant sorti, écrit-il, « sans m’en informer l’artillerie lourde pour dénoncer la nomination d’un sous-préfet à Aix sur le simple fondement d’un article de presse locale » (Marsactu relayant Mediacités). Pourtant, Sansone lui demandera par mail son avis ! Réponse de Fraudin ? « Il faut être patient, la présomption d’innocence vaut pour tous. » Et d’ajouter cette requête : « Ne plus préciser sur les documents que je suis sous-préfet honoraire »…
Sansone, lui, claque la porte en mai 2021 des instances nationales en « raison de profonds désaccords » dont le « manque de transparence ». Il sera remercié peu après, Van Beneden notant de « nombreux problèmes » : « Des comportements agressifs, des insultes »… Tout en lui assurant : « Pas question de désigner une personne du groupe Fraudin. »
Sansone crée donc Sos Corruption. Et Fraudin Ethicpol. Qui, pour se lancer, s’est fendue d’un dossier expliquant « pourquoi la présidente d’Anticor doit démissionner ». Les parrains ? Deux personnes exclues d’Anticor pour avoir contesté en justice l’AG de 2020, Françoise Verchère et Marcel Claude, candidat malheureux face à Van Beneden (et qui a donc créé AC, sa propre officine !)… « C’est très bien s’il y a plusieurs associations, nous dit-il. Après, on ne fonctionne pas de la même manière. Ainsi, dans mon association, il n’y a pas d’élus. Je n’exclue toutefois pas qu’on travaille ensemble. D’ailleurs, une antenne de AC va se monter dans le Var…»
Van Beneden, interrogée par la Provence comme par le Ravi, tacle Ethicpol, pointant un membre qui « s’est servi de son adhésion à Anticor sur des tracts » (Me Emmanuel Henri sur la liste de Marc Pena à Aix) ou cet élu d’opposition qui « a traité un dossier en cours sur sa commune » (Pierre Gelsi à St-Victoret qui a pour conseil Me Henri).
Calomnie
« De la calomnie, dixit Fraudin. Comme ces bruits selon lesquels j’aurais transmis des informations à des élus sur des dossiers ! » Mais, dans le sillage d’un article de Marsactu sur un projet de vente de terrain par la ville de Salon à l’épouse du maire, face à un autre projet immobilier, un adhérent d’Anticor a bien alerté en 2020 le comité d’éthique, faisant part de « soupçon d’atteinte à la confidentialité de renseignements qu’il aurait communiqué au GL 13 sur des irrégularités dans la gestion municipale de Salon ». En pointant Fraudin. Qui, d’ordinaire discret, avait à l’époque accordé une interview au Régional à Salon. Le comité classera sans suite, le requérant s’étant, comme il nous l’a confirmé, désisté.
De fait, si Fraudin a été premier adjoint du maire PS de Salon Michel Tonon, il rejoint vite, après avoir été démis de ses fonctions, l’opposition, aux côtés du futur maire LR Nicolas Isnard. Qui a mis à disposition une salle pour l’AG d’Ethicpol en mai : « Peut-être viendra-t-il. Mais, si on a une salle, c’est parce que j’habite Salon. Par mon parcours, je connais beaucoup d’élus. Connaître ne veut pas dire être proche. J’ai été préfet. Mais aussi conseiller pour des collectivités. » Comme Lançon où il est aussi intervenu pour le « GL13 » : « Alerté, Je suis allé voir le maire pour lui demander des explications. »
Fraudin ne veut pas « alimenter le “tous pourris” mais épauler les élus. Notamment l’opposition. On dénoncera la corruption… Mais pas question de rendre public un dossier qui n’est pas parfaitement bouclé ! ». En attendant, le référé-suspension déposé par un des membres d’Ethicpol contre un projet de la mairie de Peynier vient d’être sèchement retoqué par la justice.
A contrario, Sansone utilise les réseaux pour alerter et recueillir les témoignages, en lien aussi avec la justice ou la chambre régionale des comptes. Avec quelques résultats : « Il y a le temps de la justice… Et de la politique. Fabre-Aubrespy n’est plus maire de Cabriès, idem pour Ferraud à Trets. Gallèse n’est plus adjoint à Aix… Et ce qui se passe à Martigues prouve notre efficacité ! »
Et quid d’Anticor ici ? Toujours sous la tutelle de la référente du Gard Danielle Pellier. Qui assure que « la désignation de nouveaux responsables » c’est pour bientôt et que le suivi de dossiers « continue », citant Ventabren ou la « constitution de partie civile » à Martigues. Mais pas question d’évoquer Sos Corruption ou Ethicpol. Tout en lâchant : « On nous a alerté pour dire qu’il y avait des problèmes. Mais aujourd’hui, on se dit qu’il y avait peut-être d’autres intérêts… » Elle nous renvoie vers sa présidente. Qui souffle : « On a l’habitude des crises. Mais là, on a préféré appuyer sur le bouton “pause”… » Pour relancer le groupe, elle compte sur une réunion en mai à Aix.
Soupir de Sansone : « Anticor est une belle idée. Mais la structure n’est pas faite pour des groupes locaux! » Fraudin refusera d’évoquer les différends avec son ex-binôme. Gelsi, lui, temporise : « Je suis resté en dehors de cette querelle. Si j’ai suivi Fraudin, c’est pour faire avancer mes dossiers. Quoi de mieux que des avocats, un préfet ? » Sourire de ce dernier : « Oui, il y a Anticor… Mais aussi Transparency, Sherpa ! La matière ne manque pas. Il y a de la place pour tous ! » Celle dont il réclame la démission ne dit pas autre chose. Étonnant, non ?