Moi, Jean Reno, le grand blues...
Le 14 novembre, c’est la journée du diabète. « Atteint d’un diabète de type 2 », Jean Reno, hésitant entre les lunettes noires de Léon et le bonnet de bain du Grand Bleu, affiche sa trogne de septuagénaire dans la salle de bain de son mas de Maussane-les-Alpilles, pour un message de prévention : « Cette maladie s’apprivoise. On peut vivre avec, à condition d’adopter une certaine discipline… Je me surveille en me piquant deux fois par jour. Un seul mot d’ordre : “Faites-vous dépister !”… » (1).
Derrière la caméra, Christian Clavier lance, avec la même subtilité que son personnage de Jacquouille la Fripouille : « Okayy !!!! C’est okayy ! » (2) Reno lance un regard noir à son collègue et de chien battu à son reflet dans le miroir. Et reprend pour lui-même la question que lui pose Nathalie Portman : « La vie, c’est comme ça tout le temps ? Ou juste quand on est petit ? » Réponse : « C’est tout le temps comme ça. » (3)
« Il y a deux types d’acteurs. Ceux qui veulent à tout prix qu’on les aime. Et ceux qui ont un peu honte de ce qu’ils font » (4). Alors le message sanitaire, « je ne vous dirais pas que je n’ai pas hésité » (1). Je sais qu’« avec mon accent, être le prochain George Clooney, c’est de la science-fiction » (4). Mais de là à finir comme le Michel Cymès du cinéma français, merci ! Déjà qu’au début de la pandémie, à la veille du nouvel an, il a fallu que je me fende d’un message rassurant : « On va s’en tirer… » (5).
Tu parles ! Bon, j’vais jouer dans une série Netflix (6). Mais aussi pour une adaptation d’un bouquin de Marc Lévy… En Belgique !?! « Les producteurs cherchaient un décor semblable au Berlin de 1989. » (7) Si ça continue, je vais vendre des matelas sur les parkings de supermarché. Déjà que je suis obligé, pour faire parler de moi, de jouer les vexés en faisant mine de quitter le plateau après une mauvaise blague de Gérard Louvin chez Cyril Hanouna. Il me lance : « Il paraît que tu es fâché avec lui ! » Je lui demande : « Avec qui ? » La réponse fuse : « Mon cul ! » Alors j’ai répliqué : « Cyril, je t’aime bien, mais là… » (8).
« J’ai révolutionné le cinéma français »
Un « poisson d’avril », comme j’ai dit puisque je suis revenu sur le plateau ! Normal quand on a émergé avec Le Grand Bleu… Jouer les divas ! Y m’reste que ça. Ou les conseillers d’orientation. Pour le site Parcours Métiers, j’explique comment j’ai « révolutionné le cinéma français » (9). Après, je l’ai cherché puisque je suis référencé sur le site Brand & Celibrities pour jouer, « malgré ma discrétion dans les médias », les « ambassadeurs » ou le « parrain d’événements » (10).
Tu m’étonnes que je fasse de l’huile ! Pourtant, je les avais prévenus au Figaro : « Ça me ferait plaisir que vous ne mettiez pas mon nom. » (11) Certes, c’est depuis New York que j’explique sur BFM que je fais dans l’oléiculture en Provence (12). C’est pas comme si j’étais la seule star dans les Alpilles : Drucker, Amanda Lear, Hugh Grant, Charlotte de Turkheim… Et quand on s’emmerde, entre le pinard et l’huile, on hésite !
C’était pourtant bien parti. Le mariage en 2006 avec ma troisième épouse aux Baux-de-Provence. « La rumeur annonce carrément Elton John, Brad Pitt, Monica Bellucci, Charles Aznavour, Patrick Bruel » ! (13). Bon, ce sera Luc Besson, Richard Berry, Drucker, Jean-Claude Brialy, Laurent Gerra… Mais aussi Halliday, Sarkozy et même Jean-Claude Gaudin !
Y a eu quelques râleurs. Comme cette patronne de pizzeria : « Les restrictions de circulation nous ont privés de nombreux clients. » Ou ce touriste belge : « J’ai cru qu’il y avait eu un coup d’État avec tous ces gendarmes et ces messieurs de la sécurité qui n’étaient pas toujours très polis. » (14)
Et si c’était le début de la fin ? J’suis un des rares acteurs français à avoir eu une carrière à l’international ! Godzilla, Mission : impossible, j’ai joué avec Robert de Niro… En même temps, j’ai refusé par deux fois de jouer dans Matrix ! Et le remake US des Visiteurs a été un four. Résultat, je tourne avec des sommités comme Mickaël Young, Kad Merad… Ou je fais les flics pour TF1. Sans parler de la presse people avec le feuilleton de la succession de Johnny et les relations entre sa fille Jade dont je suis le parrain et Laetitia…
« La mélancolie, c’est mon côté andalou. Ça vient de mon père. Mais ce n’est pas si triste. Quand vous n’êtes pas heureux, vous buvez, vous mangez, vous écoutez du flamenco… Ça vous rappelle qu’il faut vivre ! » (4) C’était presque prévisible. Le succès, je le dois à Luc Besson que j’ai rencontré sur Les bidasses aux grandes manœuvres où il était assistant réalisateur ! Mon premier vrai succès, c’est Le Grand Bleu ! A 40 balais ! Comment voulez-vous que je ne coule pas ?!
Alors pourquoi pas la politique ? Attention, terrain mouvant ! Mon pote, c’est Sarkozy. On s’est rencontré en promenant le chien : « C’était une sale période pour nous. Lui était en guerre ouverte avec Chirac et moi, j’allais divorcer. » (4) Et quand je cause politique, c’est casse-gueule. Comme avec le quotidien espagnol El Mundo à qui j’ai dit que « je ne suis pas totalement français » et que je me sentais moins un « immigré aux États-Unis qu’en France ». J’ai dit aussi que « ceux qui se sont intégrés sont les non-musulmans ». Bon, il a fallu que je me fende d’un rectificatif en expliquant que « l’intégration pouvait être plus difficile lorsque la religion était placée au-dessus des lois de la République » (15).
Ça m’empêche pas de tourner avec Spike Lee et de dire que l’élection de Trump « a été basée sur la peur » : « J’espère que les gens intelligents vont prendre le dessus. » (16) Alors me voilà conseiller municipal aux Baux-de-Provence ! Adjoint en charge des grands événements ! « Ce qui m’intéresse, c’est de faire de la proximité… J’ai toujours eu cette notion de groupe. On ne fait pas un film tout seul. Pour la politique, c’est la même chose. Parfois, on parle de lois et de leurs numéros, ça peut être gonflant mais ça fait partie du boulot ! » (17) La plupart des conseils, je les sèche, n’étant là que l’été (18). Seule chose à mon actif ? La création d’un « atelier-théâtre » (19). Mais, comme je l’ai dit à la radio, « je voudrais être enterré aux Baux » (17). Y être enterré, ok, mais de là à y vivre… Après tout, mon premier film avec Besson, c’était Le Dernier combat. Okay ?