Du rap "fait maison" au hip-hop
Pour toute la deuxième génération de rappeurs, les MJC et les centres sociaux ont organisé pendant de nombreuses années des ateliers pour apprendre à poser un flow, utiliser les samples. Avant de disparaître peu à peu, semblant obsolètes face à la montée du rap autoproduit. La MJC d’Aubagne, aujourd’hui fermée, constituait un vivier de jeunes rappeurs talentueux. SCH, le rappeur de 28 ans aux multiples disques de platine, une des coqueluches du rap français actuel, y a fait ses premières scènes.
Aujourd’hui à Marseille ce sont surtout par les associations, les salles de concert comme l’Affranchi et le Makeda, ou les studios privés, qui pullulent, que les jeunes accèdent au rap. « Ça a existé, les ateliers d‘écriture dans les MJC, dans les centres sociaux. Pour récompenser ces jeunes, on montait des guinguettes pour qu’ils puissent se produire, explique Soly, président de B.Vice, association et studio d’enregistrement historique à la Savine. Aujourd’hui ça n’existe plus, il n’y a presque plus de lieux pour des ateliers rap à Marseille. » Selon lui, les institutions et politiques n’ont pas vraiment mis les moyens pour développer la culture hip-hop et la rendre accessible.
« Planter les graines »
L’encadrement des ados dans le rap est un défi pour ces structures associatives qui continuent d’organiser des ateliers d’écriture et de production musicale. L’enjeu est surtout de leur transmettre la culture hip-hop, ses valeurs de partage et de solidarité. Des valeurs que les jeunes découvrent sur le tas lors de ces ateliers, face à la dimension plus individualiste du rap actuel. « La culture rap est devenue plus populaire, mais les valeurs n’ont pas été transmises », regrette Francine Bonnot, qui souhaite « planter les graines » de cette culture chez les jeunes. Avec Aude Kaboré, leur association, Orizon Sud, organise des ateliers de rap, graff’, danse, beatbox. Hors de question pour elle cependant de créer une fracture entre « l’ancien » et le « nouveau » rap. « Jul pour eux c’est une référence, si on raccroche Jul avec le rap des années 80 c’est là que l’on peut faire de la transmission », assure-t-elle.
Pour Soly, les ateliers sont surtout l’occasion de débattre et de faire de l’éducation populaire, pour transmettre des « valeurs citoyennes ». « N’importe quel gamin a chez lui les moyens d’écrire tout seul dans sa chambre, de s’enregistrer, de balancer ça sur le Net, explique le rappeur de B.Vice. Mais dès qu’on leur offre un cadre, leur rap devient plus conscient, politique, ça va plus loin que le simple m’as-tu-vu. » Ces ateliers sont surtout une manière de permettre l’accès à la culture, au sens large, pour Francine Bonnot. « Notre but c’est que cette culture leur permette de s’ouvrir l’esprit. Leur permettre de se découvrir des talents, quelque chose qui les emballe. Leur montrer qu’ils ne sont pas voués à rester en bas de leur immeuble ou au taxiphone. » Encadrer et transmettre, pour sublimer et élever.