« Ils n'en font aucune critique ! »
Quel est le premier regard du collectif des écoles sur les données libérées par la ville ?
Julien Houles : On demande l’audit depuis très longtemps, donc on était content de l’avoir sous les yeux. Mais ce que l’on a vu ne peut pas être l’audit, sinon la ville s’est faite arnaquer. Il n’y a même pas de nomenclature pour le déchiffrer correctement ! Sinon, si le document liste de manière fouillée les difficultés des écoles, il y a des problèmes sur les constats. Exemple : sur l’emblématique école Nationale, dans le 3e arrondissement, où il y a encore eu des infiltrations dans une salle de classe en octobre, l’audit propose un changement des dalles du faux plafond mais sans indiquer le besoin de rechercher les causes du problème. Autre chose : il y a une vraie différence entre les deux lots. On l’impression que Qualiconsult, le bureau de contrôle qui a travaillé sur les écoles du Sud de la ville, n’a pas passé plus de 20 minutes par établissement.
Maurice François : Au vu du cahier des charges et du montant du contrat – un peu plus de 2 millions d’euros -, ça n’est pas étonnant. Les entreprises ont fait un état visuel des écoles, comme pourrait le faire le chargé de travaux du secteur. Mais c’est d’autant plus problématique que Qualiconsult n’a fait ni les commentaires ni les préconisations prévues au cahier des charges. Contrairement à l’Apave, qui a travaillé sur le secteur Nord, sur plus d’écoles et un coût trois fois moindre (1). C’est par exemple le cas sur un point particulièrement sensible, les cahiers de sécurité, un problème sur 66 écoles sur 470. Autre aspect non respecté du cahier des charges : les logements de fonctions des écoles. Seules les conciergeries ont été visitées, alors qu’elles ne représentent que la moitié du total. Ce qui est particulièrement ballot : la ville vient de voter une délibération proposant l’utilisation de ces locaux pour agrandir les écoles !
N’est-ce cependant pas logique que la nouvelle majorité s’appuie sur un audit qui a couté plus de deux millions d’euros ?
JH : C’est effectivement logique, mais ils n’en font aucune critique. C’est ce qui dérange. Ils pourraient dire que l’audit est mauvais, qu’il n’est pas suffisant, mais qu’il peut servir pour un classement des priorités. Mais annoncer qu’il est la référence pour la programmation et prendre au sérieux les 200 millions d’euros de travaux annoncés ne nous rendent pas serein. Autre exemple : Dans une école des quartiers sud, l’entreprise chiffre le remplacement des cloisons en placo-plâtre à 25 000 euros l’unité !
Pour vous le document pose aussi la question de la transparence promise par le Printemps Marseillais.
MF : Ce qu’ils ont communiqué, c’est un document de travail interne à la mairie, qui a été créé par une personne de la ville en septembre et modifié le 1er décembre, la veille de la libération du document (2). Nous, on demande les livrables, le reportage photo, les synthèses présentées à l’époque par Gaudin, les fiches de chaque écoles. Ce qui était prévu dans le cahier des clauses techniques et particulières. Le Collectif peut leur mettre à disposition si besoin. En tout cas, après six mois, on est très déçu de découvrir que le Printemps marseillais ne maitrise pas le sujet de la transparence. Alors même que c’est une partie importante de son programme. Ils vont devoir relire le code des relations entre le public et l’administration !
1. 581 000 euros contre 1,5 millions d’euros.
2. Contactée, la mairie explique qu’elle a répondu à la demande des médias d’accéder aux « données brutes » de l’audit. Selon elle, le fichier fourni compile les diagnostics de chaque école.
Propos recueillis par Jean-François Poupelin