Robert Ménard ne donne pas envie de Béziers
« Ils vous ont laissé rentrer, vous aussi ?! », lance à notre collègue de Marsactu le sénateur-maire FN marseillais Stéphane Ravier que l’on interrogeait lors des Estivales de Marine Le Pen à Fréjus. Entre le FN et les médias, derrière les sourires, c’est toujours aussi complexe.
Au-delà du refus d’accréditer pour ses universités Mediapart, il y a entre les mairies frontistes et ceux qui doivent couvrir l’actualité au quotidien une guerre de basse intensité. Comme à Fréjus entre David Rachline et Var-matin ou Mosaïque FM (1).
D’ailleurs, à Béziers, que Robert Ménard soit un ancien de Reporters sans frontières ne l’empêche pas de s’en prendre à Midi Libre, dénonçant cet été « l’info tenue en laisse ». Si les relations sont aussi orageuses, c’est parce que, pour les édiles, qui plus est lorsqu’ils sont d’extrême droite, l’information est un véritable enjeu. Une arme aussi.
Et ce n’est pas un hasard si, dans les villes qui sont tombées dans l’escarcelle du Front, ont fleuri feuilles, sites web et pages Facebook pour raconter, dénoncer et comprendre. « Après l’élection de Ménard, l’atmosphère était plombée. On était sonné. Et puis, un jour, dans le journal municipal, il a utilisé l’expression "No pasaran". On ne pouvait laisser passer », se souvient David Garcia. C’est ainsi qu’est né fin 2014 le site internet Envie à Béziers (2).
Le site, mêlant enquête et satire, fait la part belle aux frasques de l’édile : « Si on réagissait à chacune de ses sorties, on pourrait alimenter notre site chaque jour. On ne s’en tient donc pas qu’à ça. Au-delà des conseils municipaux et des conférences de la fachosphère, il y a donc de la critique littéraire, de la culture et l’envie de montrer qu’à Béziers, il n’y a pas que Ménard. »
Organisant projections et débats, le site se veut « le journal majoritaire » : « Une manière de rappeler que, sur l’ensemble du corps électoral, Ménard n’a rassemblé que 25% des suffrages. Ce qui ne doit pas masquer le fait qu’il suffit aujourd’hui de coller un autocollant FN sur un âne pour le faire élire. Même s’il n’est plus odeur de sainteté au Front, Ménard travaille malgré tout pour le FN. »
Tandis qu’à la faveur de la restructuration de La Marseillaise, un ancien de L’Hérault du Jour a lancé un hebdo satirique sur Béziers, La Pieuvre, le site ambitionne toujours de faire le lien avec les autres publications qui ont vu le jour dans les villes frontistes : « On a des contacts avec les journalistes du coin mais aussi avec des médias dans d’autres régions, comme dans le nord. »
En revanche, sourit David, « ce que je sais, parce que j’ai passé 45 minutes en tête-à-tête avec lui dans un train, c’est que Ménard, s’il nous connaît, ne nous lit pas. Ce qu’il aime, ce sont des adversaires qui utilisent les mêmes méthodes que lui. L’invective, l’attaque… Des articles de fond sur sa politique, ça ne l’intéresse pas. » De quoi assurer à nos confrères une relative tranquillité. Et, derrière la ligne du Front, ça n’a pas de prix !
Sébastien Boistel