De l’art de picoler
A chacun sa façon de consommer et d’apprécier le vin : petite balade éthylique marseillaise…
Si certains se la jouent nouveaux riches avec bateau et vin naturel (lire page 16), d’autres, moins bling-bling, emmènent avec eux sur les rochers de Malmousque du Rosé de mauvaise facture qu’ils ouvrent en poussant très fort sur le bouchon à l’aide d’un jeu de clés, faute d’avoir pensé au tire-bouchon. Peu importe le flacon… « Ah oui, on en a qui font l’ouverture au rosé tous les matins à 7h30 et qui viennent faire la fermeture le soir, rigole la tenancière d’un minuscule rade aux lambris défraichis de la rue Saint-Savournin. Tiens, y’en a même un qui a oublié sa casquette » Ce matin-là, vers 9h 30, seuls deux piliers sont accoudés au zinc mais devant un pastis ! Rude concurrence…
Mais restons sérieux. Dirigeons nous dans un domaine, celui d’Henri Milan, tout près de Saint-Rémy-de-Provence, réputé pour ses vins naturels (Cf p.16). C’est Théophile, le fiston décontracté, qui fait goûter plus d’une douzaine de références à une famille du sud-ouest et à un jeune sommelier d’un restaurant parisien chic. On sent, on aère le produit et on utilise des mots compliqués pour dire qu’il est très bon. Vrai par ailleurs. Et puis, à 11h30 du matin, on crache bien évidemment. Même du pinard à 100 euros la quille, le Jardin 2011, qui ne les vaut sûrement pas mais qui reste exceptionnel en bouche.
Un peu plus détendu parce qu’entre amis, ce rendez-vous à la Cave de Baille, un mercredi soir à Marseille : Richard et Adrien, qui connaît la maison pour y avoir fait un stage, discutent en fumant une cigarette dans la cour autour d’un Bourgogne blanc. « Tu vends de l’alcool, du bonheur », plaisante Adrien en s’adressant à Olive, l’un des gérants. Ils viennent ici « pour boire du bon vin » et « tester les nouveautés ». Quand ils achètent – jamais en supermarché – c’est environ 20 euros la bouteille.
Un peu plus loin, rue Sainte, autre endroit branché, avec le bar à vin La Part des anges. C’est là qu’Elodie et Alexandra sirotent un fameux Paternel blanc avec assiette d’antipasti. « Je préfère boire une bière dans un bar classique à moins qu’il y ait une carte correcte », explique, fine bouche, Elodie, qui a longtemps travaillé dans la climatologie de la vigne. Elle adore rencontrer cavistes et vignerons et prévoit d’organiser des dégustations à la maison cette année. Mais les deux concèdent aussi apprécier le rosé l’été, une période où elles en consomment tous les soirs ou presque. Profitez, l’hiver arrive…
Clément Chassot