Moi, Sabrina Roubache, serial winner
Chloroquine (titre provisoire)
Note d’intention
Ce film sera le récit d’un déchirement. Personnel et collectif. Dans une France déboussolée par quarante ans de crise économique, mise moralement à terre par le confinement et la peur du Covid, un médecin se dresse, tel un de Gaulle en cheveux longs et blouse blanche, pour mener la révolte et faire chuter le président de la République (1). Entre eux, une femme. Elle est amie de l’épouse du président. Elle doit la vie au professeur, qui l’a sauvée de la maladie. Dans quel camp va-t-elle se ranger ? Dans quel camp DOIT-elle se ranger ? Entre son passé d’enfant des quartiers, qui comprend la révolte populaire, et son présent de serial entrepreneuse, mariée à un prof de droit lancé en politique et qui sait qu’entre extrême-centre, centre-droit et à droite toute, ensemble tout devient possible… où doit aller sa loyauté ?
Pour la première fois je souhaite porter à l’écran un scénario personnel. Car le « télescopage de deux mondes, c’est toute ma vie (2) ». Je suis une « Colomba des quartiers, reconvertie en Carmen de l’audiovisuel (3) » et de la politique. Car si mon mari n’y fait encore que de la figuration, en politique, moi « ma manière de faire de la politique, c’est le cinéma (4) » !!
Avec Chloroquine, Gurkin production s’empare d’un sujet brûlant : la crise du coronavirus comme révélateur de la ligne de faille morale et politique qui traverse toutes les démocraties libérales. Cette série en une saison et six épisodes s’inscrit en droite ligne dans le parcours de Sabrina Roubache, fondatrice de Gurkin. Fille d’un maçon algérien et d’une mère aide-soignante, elle grandit dans la cité Félix-Pyat à Marseille, le quartier le plus pauvre d’Europe. Sa vie bascule quand elle rencontre Akhenaton, leader d’IAM, en repérage pour un tournage dans le quartier. Créative et débrouillarde, elle devient assistante de production, participe aux tournages des clips du mythique album L’école du micro d’argent. Après avoir travaillé dix ans dans la production documentaire, elle crée sa propre entreprise en 2012. Son modèle économique ? Utiliser les défiscalisations sur l’ISF mises en place par Nicolas Sarkozy, pour proposer 50 % de réduction d’impôt à partir de 90 000 € d’investissement (5). « Cela nous évite les contraintes de validation de l’Autorité des marchés financiers [….] et les incertitudes liées aux financements publics (5). » Sarko, il a peut-être une politique répressive dans les quartiers, mais pour les entrepreneurs, pardon !
« La Carmen de l’audiovisuel »
Sabrina Roubache produit pour elle, mais elle sait aussi produire pour d’autres : « Ses connaissances du territoire et son fort réseau local lui permettent de tourner dans les zones les plus sensibles de la cité phocéenne en y assurant des conditions privilégiées, afin d’inclure les jeunes de ces zones dans les équipes de tournage (6) ». Un mélange de fixer – ou contact local comme disent les journalistes étrangers – et d’assistante sociale ! C’est comme cela qu’elle devient productrice exécutive pour la série Marseille, premier tournage de Netflix en France, 1 million d’euros de budget par épisode. Dans les cités, dans les milieux économiques, auprès des politiques, elle sert de sherpa à l’écrivain Dan Franck qui prépare un scénario ambitieux, du The Wire à la française. À l’arrivée, massacrée par son réalisateur qui en fait une rencontre aïoli entre Sous le soleil, Scarface et Dynastie, Marseille est, selon la critique unanime, un hommage paradoxal à son décor : « Depardieu a autant bossé comme acteur sur le projet que Gaudin comme maire ces dernières années (7) ». Avec au zénith un Benoît Magimel s’essayant à l’accent marseillais pour placer dans la même phrase « zboub » et « Picasso ».
Heureusement, l’échec artistique n’est pas imputable à Sabrina Roubache, qui rebondit sur ce formidable tremplin glissant pour se faire connaître et multiplier les projets. À une soirée de campagne de la liste qu’elle soutient à la chambre de commerce, elle rencontre son futur mari, le jeune doyen de la fac de droit Jean-Philippe Agresti. Les tourtereaux vont se retrouver à la table d’Emmanuel et Brigitte Macron, venus lancer la campagne présidentielle à Marseille. Sabrina tacle gentiment le couple : « Je devais passer la soirée avec mon amoureux et nous avons préféré venir vous rencontrer. Mais il se retrouve à l’autre bout de la table alors que vous avez la chance de dîner à côté de votre mari (8) ». Une amitié indéfectible naît entre les deux femmes. « Elles se téléphonent chaque semaine (9). » Quelques jours plus tard, Sabrina Roubache fera le discours d’ouverture du grand meeting En Marche de Versailles. Mais à peine élu, le mari de Brigitte supprime l’ISF, sur lequel repose tout le modèle économique de Gurkin ! Qu’à cela ne tienne, entre-temps, Sabrina Roubache s’est déjà tournée vers d’autres investisseurs : place aux Sud-Coréens. « Ils ont une manière de financer l’entertainement beaucoup plus simple que la nôtre, ils ne sont pas à la merci des aides publiques (10). » Et en avant pour un projet de série sur un trafic entre Marseille et la Corée (scénario Dan Fanck) !
Car en véritable « boule d’énergie (3) », Sabrina Roubache ne lâche jamais. Quand Brigitte Macron veut venir en visite dans les cités de Marseille, c’est elle qui lui sert de guide. Jean-Philippe Agresti, qui se verrait bien tête de liste LREM aux municipales, se colle à son épouse pour être sur la photo. Las, malgré toute l’amitié de Brigitte, Jean-Philippe sera supplanté par un autre prof de fac, le médecin Yvon Berland. Dépité, Jean-Phi ralliera Martine Vassal, qui l’enverra au casse-pipe dans le secteur du dissident Bruno Gilles. Mais Sabrina elle, a déjà trouvé une nouvelle cause. Contaminée, comme tout le cluster de la droite marseillaise, par le coronavirus, et « très mal en point (9) », elle est soignée dans l’institut du professeur Raoult, et guérit vite. Brigitte prend de ses nouvelles, et décide de mettre en contact le professeur et le président. Entre Jupiter et le « druide », c’est le début d’une relation de fascination mutuelle, transformée en affrontement par la montée des populismes.
Et me voilà aujourd’hui devant vous, investisseurs, diffuseurs, partenaires, pour vous soumettre ce projet. L’histoire d’une femme libre, pour qui « quand on n’a rien à perdre, on ne doit pas hésiter une seconde (11) ». L’histoire d’hommes qui auraient pu construire ensemble mais qui vont se détruire l’un l’autre. L’histoire de deux villes, qui devraient se compléter au lieu de s’affronter. L’histoire d’un pays qui, toujours, cherche son salut dans un chef plutôt que le trouver en chacun de nous.
Je vous remercie.