Panique dans l'isoloir
Une envie à vous tirer des sueurs froides. Je longe les murs, incertain. Mon œil fiévreux parcourt les façades, scanne les places. Ma démarche est visiblement modifiée et le regard des passants commence à s’appuyer sur moi quand ils me croisent. Un commerçant m’indique un endroit tout proche et mes derniers pas doivent ressembler à une chorégraphie pour possession vaudoue. Mon cortex incrédule identifie enfin la petite pancarte « toilettes publiques ».
L’endroit est blanc, propre, parfaitement vide. Comme l’intérieur nacré du crâne d’un champion du monde de méditation. Un chiotte à la turque m’attend au fond de cette coquille merveilleuse et je me demande si je ne suis pas en train de rêver. C’est comme si je rencontrais le Service Public en personne : un lieu vraiment là pour moi, humain parmi les humains, un endroit parfaitement propre, providentiel.
Et puis, comme une évidence, la déception. La désillusion infâme. Comment ? Pas de papier ?
Alors mais ?!… Tout ça pour ça ?
Je vérifie à ma gauche et ma droite. Je n’arrive pas à y croire : il n’y a pas trace aux murs du plus petit projet d’accrocher du papier toilette dans cet endroit. Si c’est un rêve, il est en train de tourner au polar haletant. Comment vais-je m’en sortir ? Ma sacoche contient une grosse enveloppe en kraft marron depuis quelques jours. Ce sont les programmes de tous les candidats au premier tour des élections présidentielles. Le gentil Service Public réapparaît dans un nuage comme le génie de lampe : « Choisis le programme avec lequel tu as envie de t’essuyer » me dit-il. Docile, je commence ma lecture.
En bon citoyen, je laisse une pile bien propre de programmes pour les suivants et je continue ma route. En hommage à ce grand moment de démocratie, je vous propose en exclusivité une recette de moules bleu blanc rouge.