« Occupez-vous de vos enfants ! »
A la rentrée 2014, c’est avec cette phrase, devenue célèbre, que le maire de Marseille répond aux reproches de parents d’élèves excédés par l’impréparation municipale dans la mise en œuvre des temps d’activités périscolaires. Reçue comme une gifle par une bonne part des parents, la formule risque d’être de nouveau d’actualité à la rentrée 2015. Désormais mises en place sur deux jours, mardi et jeudi, ces fameuses TAP font office de repoussoir. « L’an dernier, c’était la cata et, cette année, c’est rebelote. Au lieu d’associer les parents, on a eu droit à une pseudo-consultation des conseils d’école. Rien n’a vraiment été anticipé », peste Cécile Vignes, présidente régionale de la Peep et parent d’élève à Marseille depuis 25 ans.
Du coup, la petite phrase du maire lui reste en travers de la gorge. « Elle est indigne d’un premier édile, constate-t-elle. Cela témoigne que l’éducation n’est pas une priorité de la Ville alors que c’est une des conditions de la bonne santé d’une société. » Hâtivement classée à droite, la Peep locale dresse un constat sans appel de la politique éducative de Jean-Claude Gaudin. « Il n’y a pas de vision à long terme. À la région, il avait lancé un vaste chantier de rénovation des lycées. À Marseille, c’est rien ou presque. » Pourtant dès 1995, la municipalité avait initié un plan école réussite censé améliorer le parc scolaire vétuste transféré par l’Etat dans les années 1980. Mais, comme souvent, les finances n’ont pas suivi. « En sept ans et demi, au service d’urbanisme, nous avons sorti trois écoles », soupire Jean Canton, l’ancien directeur général de l’urbanisme de 2002 à 2009 .
« Les parents en ont marre de se battre pour tout, résume de son côté Séverine Gil qui préside le Mouvement des parents d’élèves après une scission avec la FCPE. Un exemple : mon mari a fait la queue pour inscrire nos enfants dans un centre de loisirs municipal pour le centre aéré du mercredi. Je lui ai dit qu’il fallait qu’il soit là à 5 heures. Quand il est arrivé, il était 30ème. Certains étaient là depuis la veille. C’est symptomatique d’un dysfonctionnement. » Alors des parents craquent et renoncent à l’école publique. Le privé n’applique pas la réforme des rythmes scolaires et assure un niveau de service qui fait clairement peser la balance de son côté. Résultat : il gagne du terrain. « À Aix-Marseille, les pertes du secteur public sont compensées par la hausse du secteur privé », note ainsi le ministère de l’Education nationale pour l’année 2011.
Même si le diocèse ne se précipite pas pour communiquer ses chiffres, la tendance lourde est à un transfert d’effectifs : 1000 écoliers perdus par le public malgré une hausse démographique de 50 000 habitants. Le laisser-faire municipal y incite et à cela s’ajoute un coup de pouce financier. En octobre 2014, le Ravi écrivait : « Si depuis 2005 le forfait du privé a flambé de 74%, le budget de fonctionnement de l’éducation de la ville (hors masse salariale et investissement) a, lui, dû se contenter d’un petit +10% jusqu’en 2013, dernière année connue. »
Dans l’entre soi du cours Bastide qui inaugure ses locaux flambant neufs de la rue de Lodi, les mots confirment les chiffres. Ce jeudi soir, le maire « exceptionnellement » n’a pu être là. Mais neuf élus de la majorité municipale sont présents. Et son représentant le maire de secteur, Yves Moraine, n’y va pas par quatre chemins. Il s’adresse aux élèves de ce très ancien établissement privé de la ville en tant qu’élèves de « l’enseignement catholique » : « Soyez fiers de votre foi face à tous les fanatismes et à tous les renoncements. Grâce à l’enseignement catholique, des familles éloignées des préceptes des livres sacrés peuvent se sortir de situations parfois peu enviables. » Ce n’est pas Gaudin qui parle, mais il ne renierait aucun de ces mots. Pour l’école, la messe est dite…
Benoit Gilles & Julien Vincent (Marsactu)
Pour « célébrer » dignement les 20 ans passés par Gaudin dans le fauteuil de maire de Marseille, il n’en fallait pas moins de deux rédactions ! En juin, le Ravi a ainsi accueilli dans ses colonnes Marsactu. Nous étions ravis de soutenir ainsi le pure player phocéen, liquidé en mars, repris en avril par ses journalistes. Ils préparent pour la rentrée leur grand retour en ligne. le mensuel « pas pareille fête donc aussi la nécessaire renaissance de la presse marseillaise indépendante !