Sport à l’université : ça va suer !
C’est un square comme il y en a de moins en moins à Marseille. Celui de la Plaine. Un des rares endroits où les minots du quartier, pour peu qu’ils ne craignent ni les tessons de verre ni les merdes de chien, peuvent taper dans un ballon. A moins qu’ils ne préfèrent le bitume du parking. Sur cette place, ont été placardées des affiches à la gloire de « Marseille Capitale Européenne du Sport », le nouveau label dont a été affublée la cité phocéenne pour 2017. Des affiches qui, très vite, ont vu fleurir quelques commentaires. « Marseille, champion du pipeau. » Ou encore : « Les Marseillais font briller leur ville par leurs piscines fermées… »
Et il n’y a pas que les commentateurs anonymes qui font preuve d’un certain scepticisme. Dans la droite ligne du secrétaire de la fédération du PS 13, Jean-David Ciot, aussi dubitatif à l’égard de la capitale européenne de la culture qu’envers celle du sport, Stéphane Mari, le patron du PS marseillais a eu, sur Europe 1, la dent dure à propos de cette distinction : « C’est une escroquerie intellectuelle de la ville de Marseille. Ça ne nous rapporte rien. Au lieu d’avoir de l’argent, combien allons-nous payer ? »
Toutefois, au-delà de ce label ronflant octroyé l’an dernier et des polémiques qu’il suscite, avec la mer, les calanques, environ 1500 clubs de sport et 150 000 licenciés, Marseille devrait être pour l’étudiant ayant fait sien l’adage « mens sana in corpore sano » une terre sinon d’élection du moins d’exception. Même pas. Pourtant, de prime abord, faire du sport à la fac semble sinon facile, du moins abordable : 15 euros pour une activité, 3 euros pour la seconde, les cinq campus proposant pas moins de 150 activités sportives.
« Marseille, champion du pipeau »
Encore faut-il que le sport de son choix soit proche du lieu d’étude et que les horaires soient compatibles avec l’emploi du temps. Mais, de fait, la première épreuve, c’est de s’inscrire. Car, en général, les bureaux d’inscription ne sont ouverts qu’entre 8h30 et midi, rarement après. Et, une fois cet obstacle franchi, l’accès n’est en rien garanti. Comme le constate Olivier, prof de sport à l’université : « C’est surtout les infrastructures qui manquent, ici. Les gymnases sont trop petits. Et emmener les élèves à la piscine, ce n’est même pas la peine. Une fois sur deux, c’est fermé… » Une problématique qui ne concerne pas que les étudiants. Mais, in fine, la disparité en termes de matériel et d’infrastructures entre les différents sites limite autant le nombre de places disponibles que la diversité des sports proposés.
Le salut pour l’étudiant qui veut en suer serait-il hors de la fac ? Las, une bonne part des clubs de sport ne proposent même pas de tarif étudiant ! En témoignent les tarifs exorbitants pratiqués par les salles de fitness ou de musculation, pourtant prisées par les étudiants : autant dire que les négociations sont rudes pour y avoir ses entrées. Reste que les clubs d’escalade dans les calanques pratiquent, eux, des prix raisonnables.
Dans la ville de l’OM et du cercle des nageurs marseillais, la capitale européenne du sport permettra-t-elle de généraliser ces pratiques ? Rien n’est moins sûr. Car, pour faire la retape auprès des étudiants en faveur de, pêle-mêle, la capitale européenne du sport, la métropole, se déroulera fin juin le « Delta festival », un festival organisé « par et pour les étudiants ». Et qui se tiendra sur les plages du Prado. Un privilège qui avait été initialement refusé à Jean-Luc Mélenchon en 2012 ou, plus récemment, au « Off » de MP2013 qui voulait y organiser l’an dernier un « festival de la merguez ».
Là, pour écouter un Dj qui officie dans « Games of Throne » et autres sommités, il en coûtera 25 euros. Mais, pour en savoir plus sur le VIH ou les dangers de l’alcool, ce sera gratuit. Comme pour faire du sport. Et l’un des organisateurs, Mathieu Predal, d’espérer, de la part des étudiants, « un réveil des consciences ». Nous, on attend encore celui des nageurs censés jouer les parrains de la capitale européenne du sport, Fabien Gilot et Frédéric Bousquet – qui n’ont pas daigné répondre à nos sollicitations sur les réseaux sociaux. Pas de doute, le journalisme, comme la sociologie, est bel et bien un sport de combat !
Margaux Bourgabel, Clara Verdanet et Julien Save