J’ai rêvé New York
Elles sont douze élèves du collège Jacques Prévert à Frais Vallon, dans les quartiers Nord de Marseille, à vouloir partir à New-York pour danser avec les plus grands comme Bill T Jones (honoré par Obama pour l’ensemble de sa carrière) et la Arnie Zane dance company ainsi que la compagnie Alvin Ailey II. Loin d’être un caprice d’ados rêvant des States du haut de leur tour HLM, cette parenthèse américaine prend tout son sens dans le cadre du projet Racines en mouvement. Il est né, en 2007, de la volonté de deux femmes, Véronique Debauche, professeur d’anglais dans les quartiers nord depuis 20 ans et la chorégraphe Marie-Christine Saby (Association Iles du Sud-Kaloum). Elles s’acharnent à montrer une autre image des quartiers Nord, loin des clichés.
« Il faut pousser les jeunes vers l’excellence et montrer que cette excellence habite nos cités », martèle Véronique Debauche. Racines en mouvement a permis à ces gamines de faire le lien entre les danses urbaines dont elles sont férues et les danses africaines de leurs ancêtres dont elles ignoraient tout. Savoir d’où l’on vient pour savoir où l’on va… et elles, elles veulent aller à New-York ! Sur scène, leurs profs exigent le meilleur, et ça paye puisqu’en en juin dernier, elles ont fait l’ouverture du Festival de danses et des arts multiples de Marseille, chose rarissime pour une troupe d’amateurs.
« On dépasse là, la dimension socio-culturelle, on est vraiment dans l’artistique, précise Véronique Debauche. Et si elles partent ce n’est pas parce que ce sont des filles de banlieue mais parce qu’elles ont travaillé dur pour arriver là ! » Mais le projet arrive trop tard pour obtenir des subventions, les élèves se mobilisent et organisent des collectes dans le quartier, à Noël, elles feront aussi des paquets cadeaux au centre Bourse et un appel aux dons de 6000 euros – pour bien faire il en faudrait 14 000 – a été lancé avec succès sur Kiss Kiss Bank Bank (« 12 jeunes danseuses à New-York »). Et Véronique Debauche de conclure : « Pour ces gamines c’est vraiment une occasion inespérée de danser avec les plus grands et surtout de montrer ce qu’elles savent faire. Mais c’est aussi une action qui, si elle aboutit, peut marquer positivement tout un quartier. »
Samantha Rouchard