Avis de décès ?
Pour faire des économies, supprimons les communes ! C’est une récente proposition du patron des patrons, Pierre Gattaz… Avec la montée en puissance des intercommunalités et l’émergence de métropoles, le maire a du souci à se faire. Est-il en passe de devenir un simple fonctionnaire, dont le rôle serait de passer les plats entre la plèbe et le grand argentier intercommunal ou métropolitain ? « C’est vrai que si c’est pour s’occuper de l’état-civil et célébrer quelques cérémonies, il n’y aura plus beaucoup de candidats… », consent Didier Bonnefoy, président de l’union régionale du syndicat SNDGCT représentant les directeurs généraux des services (DGS), des fonctionnaires au cœur de la machine municipale.
En 2014, lors des élections municipales, les intercommunalités vont encore passer un cap : les sièges seront désormais attribués non plus seulement aux vainqueurs du scrutin mais aussi à l’opposition. Ce qui fera des EPCI (1) des institutions à part entière, où les débats sonneront moins creux qu’à l’heure actuelle. Signe de cette prise d’envergure, ils vont récupérer des compétences comme le prévoit l’acte III de la décentralisation, à l’instar des plans locaux d’urbanisme qui vont devenir obligatoirement intercommunaux (PLUI). Même si certains contours de la loi sont encore « flous », William Benessiano, maître de conférences en droit public à l’université d’Aix-Marseille, rappelle que ce nouveau statut prodigué aux intercommunalités vise une meilleure efficacité politique à moindre coût.
« C’est évident que les maires ont moins de pouvoir qu’auparavant, assure Alain Milon, sénateur UMP de Vaucluse, président de la CCPRO (2) et maire de Sorgues de 1989 à 2010. Il était plus facile de prendre des décisions pour moi en 89 que pour le maire actuel sur la voirie ou les ordures par exemple. » Recevoir les plaintes, gérer les problèmes des administrés sans pouvoir faire grand-chose, est-ce le rôle du maire actuel ? « C’est un peu cela… Il est clair qu’il vaut mieux aujourd’hui être président d’une intercommunalité pour être efficace localement », continue l’ancien médecin qui – c’est assez rare pour le souligner – reconnaît « aimer le pouvoir mais surtout l’exercer » alors qu’il s’apprête à livrer bataille contre le maire d’extrême droite d’Orange, Jacques Bompard, pour garder son poste.
L’autre projet de loi faisant bondir nos chers bourgmestres dans les Bouches-du-Rhône, c’est la métropole. Un concept lancé par Sarkozy, repris par la gauche, qui doit aboutir à la création d’une « super institution » aux prérogatives très larges d’ici le 1er janvier 2016. Elle devrait couvrir la moitié Est du département pour tenter de concurrencer d’autres pôles urbains européens comme Gênes ou Barcelone. « La métropole est une avancée logique au vu des dysfonctionnements qui animent ce territoire, soutient Didier Bonnefoy du SNDGCT, également DGS de Châteaurenard. Mais je m’attendais à ce qu’elle soit amenée à gérer les transports, l’économie ou encore le logement. Là, ce qui est prévu est trop large. Quel intérêt de confier la gestion des cimetières à la métropole ? Il faut garder aux communes un rôle de proximité. Si un gros mastodonte vient à couper ces liens, je ne sais pas ce qui peut se passer. »
Les « 110 maires en colère » (sur les 119 du département) protestent contre le caractère centralisateur de cette métropole et ne veulent pas payer pour tous les maux de Marseille. Quitte à en faire des tonnes, comme la mairie de Mimet, qui dans son bulletin municipal d’avril dernier n’a pas hésité à jouer sur les peurs en prophétisant l’arrivée des barres HLM version quartiers Nord sur les hauteurs de ce petit village champêtre. Pour Jacques Bucki, le maire PS de Lambesc en pointe sur le combat anti-métropolitain, « on est dans le brouillard le plus complet vis-à-vis de ce projet de territoire. Me représenter en 2014 ? Je ne sais pas, je n’ai pas envie d’attendre que les décisions se prennent à Marseille ».
Le député EE-LV de Gardanne, François-Michel Lambert, est quant à lui très critique vis-à-vis des réticences des maires : « Le président de la République mis à part, le maire est l’élu qui a le plus de pouvoir aujourd’hui et, paradoxalement, celui qui est le moins contrôlé avec des conseils municipaux souvent à sa botte. Il a un pouvoir direct sur les finances, la police, l’urbanisme… Bien sûr qu’ils vont perdre de l’influence mais on est dans le chacun pour soi aujourd’hui et le territoire a besoin que les élus travaillent collectivement. » Et l’écologiste d’assener : « pour certains, ce qui se cache aussi derrière cette fronde, c’est la peur de perdre les leviers du clientélisme local. »
Clément Chassot
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