Moi, Hélène Castaner, ACABlée*
« Hélène, je m’appelle Hélène / Je suis une fille / Comme les autres. » (1) Pas tout à fait. J’aurais pu m’appeler Brigitte. Comme la femme de celui avec qui mon mari a une relation dont il « assume la dimension amoureuse » (2). Ou comme la « femme de flic » du groupe Ministère A.M.E.R (3). Je suis la femme du « 1er flic de France ». Mon « Cri-cri d’amour » (4) devenu sinistre de l’Intérieur. Et je suis en deuil. Comme 28 de ses collègues, il a mis fin à ses jours. Il a retourné son « arme de service » contre lui : un smartphone chargé comme un taser qu’il a jeté dans son bain ! (#)
Il y a peu, il assurait : « Être aimé n’est pas le sujet » (5). Tout en gardant « [son] âme de gauche » (4). Sont-ce les invectives, les menaces ? Il y a quelques mois, quand il était « porte-parole » du gouvernement, notre maison a été taguée : « On va te vacciner » (6). Ça a continué : « Ma maison a été attaquée par les gilets jaunes. Je trouve ça insupportable. Qu’ils m’attaquent, qu’ils m’insultent, qu’ils trouvent que je sois nul, je l’entends… Mais qu’on ne touche pas à ce qui relève du privé. » (7)
Ce matin, il a flanché devant ces nouvelles inscriptions. « All Castaner Are Bastards » (8) ! « Kill the cop inside you » (9) ! Mais est-ce ça qui l’a incité à imiter son père ? Me voilà seule, moi Hélène : « Si mes nuits sont pleines / De rêves de poèmes / Je n’ai rien d’autre » (1) Il a toujours été sur « le fil du rasoir » (10). Retour sur les « années lycée » (11). « Argent facile » (12), poker, liens avec le « milieu »… « Casta » aurait pu « mal tourner » (12) : « Une époque au cours de laquelle j’ai effectué diverses activités que je n’ai pas inscrites sur mon CV parce qu’elles étaient trop courtes et pas assez sérieuses » (13). Sa « part d’ombre » (12).
« [Je n’ai] jamais cautionné ça. Sans être dans la sanction, [je lui ai] juste rappelé qui [il était]. [J’ai] eu [mon] bac avec mention. [Il s’est] dit qu’[il devait] reprendre les études. [Il] ne [voulait] pas [me] perdre » (14) : avant de l’être dans le secteur bancaire, c’est pour lui que j’ai été un cadre. C’est moi qui le fais rentrer dans les « clubs » Forum de Rocard.
Entre ici et Paris, pour se faire élire à Forcalquier, c’est avec moi qu’il laboure le terrain. Et Jade, notre aînée, dont le premier mot sera… « boîte » (15). « Aux lettres », évidemment ! Il peut me remercier : « J’ai la chance que mes filles aient une maman qui est hyper-disponible et qui me sécurise dans ma vie parce que je ne pourrais pas faire le métier que je fais si on n’était pas heureux et on n’était pas sûr que ses enfants le vivent bien » (16) Nos « filles », sa « plus grande fierté » (17). Même s’il ne peut s’empêcher de raconter « le premier repas avec le jeune fiancé de mon aînée : un plat en sauce a terminé sur son pantalon tout neuf… et je n’y étais pour rien ! Le pauvre, il était déjà très intimidé » (17). Pas étonnant qu’elle n’ait pas « informé ses camarades » (14) de prépa de l’identité de son père.
« Ma sécurité sait se faire efficace et discrète »
Vous imaginez ? Mon père, c’est celui qui fait le compte-rendu du conseil des ministres en Velib. Qui ouvre le meeting marseillais de Macron avec une écharpe du PSG. Qui explique à des gosses de primaire où tirer avec un LBD. Qui, après s’être désisté pour faire barrage au FN en Paca, est nommé « adhérent d’honneur » de Génération Identitaire (18) pour avoir déclaré que « certaines ONG » d’aide aux migrants ont « pu se faire complices » des passeurs pour avoir été « en contact téléphonique avec » (19) ces derniers…
Celui qui s’est pris une amende pour une caricature pornographique de la future maire d’Avignon. Qui s’est plaint de la « tenue trop ample » de Rihanna (20). Celui qu’on surnomme le « kéké », « Simplet » (21). Le « bouseux de Forcalquier » (22) ou le « Gaston Lagaffe de la place Beauveau » (13). Sans oublier, prophétique, le « Kennedy du 04 » (24). Quand on lui demande « avec qui aimeriez-vous ne pas être fâché ? », il répond : « La mère de mes filles, je serais mal sinon ! » (17) Pas gagné. Il a beau se voir dans « 10 ans auprès de [sa] famille », il confesse : « J’ai disparu de ma vie privée. C’est dur » (25)
Le plus dur, c’est qu’elle a perdu son caractère privé. Pourtant, en arrivant place Beauveau, il déclare : « Au moment d’accepter cette proposition, on s’interroge sur la responsabilité qui est celle du ministre de l’Intérieur. Sur sa capacité à assumer cette fonction » (26). Le 1er ministre dira qu’il est « parfaitement armé » (27). Les gilets jaunes que « ça crève les yeux » ! (28) La Canarde sauvage a eu le nez creux. Le satirique qui le surnomme le « très craint des Alpes » ou « porte-coton » s’était fendu d’une petite annonce titrée « Fuck news » : « Gala recherche info Q sur C.C ». Avec cette précision : « S’adresser à la rédaction » (29). Et voilà celui dont le mot préféré est « ivresse » en boîte de nuit dans les bras d’une ancienne collaboratrice et en Une de la presse people !
Difficile de dire : « Tout ça, ça ne me ressemble pas. Ce n’est pas moi. » (2) Même Brice Hortefeux y est allé de son bon mot : « Quand j’étais ministre de l’Intérieur, je ne suis allé qu’une fois en boîte de nuit, c’était pour les vœux du syndicat SGP-FO. Et j’étais avec le patron de FO. » (30) J’ai eu les honneurs de la facho-sphère : « Castaner se prend un flagrant délit d’adultère : allô Hélène ? » (31). « Il s’agit de ma vie privée et de ma famille qui peut être respectée » (32), a tonné mon mari, ne pouvant s’empêcher d’ajouter que sa « sécurité sait se faire efficace et discrète » (33). Elle… Et pas question de faire plaisir à « Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et aux gilets jaunes » (34) en démissionnant. Tout en promettant : « Vu l’emballement, je ne le referai pas. » (34)
S’il n’y avait la loi sur l’interdiction d’être masqué dans l’espace public, je porterais un passe-montagne 24 heures sur 24. Alors je ne mets plus les pieds dehors. C’est pas plus mal ! Quand je sors acheter des carottes bio, Forcalquier prend des allures d’annexe de la place Beauvau. Bon, soyons philosophes. Il aurait aimé être « chanteur de hard rock » (17), il a fini comme Claude François. J’entends mes filles. Bonjour Jade, Bonjour Léane ! Il va falloir être fortes. Papa a encore fait une bêtise. Une grosse. Non, pas comme d’habitude. Vous m’écoutez ? Mais qu’est-ce que vous fichez avec ces gilets jaunes ? Et puis c’est quoi ces bombes de peinture ?! C’est quand même pas vous qui… ?!
* ACAB : Acronyme signifiant « all cops are bastards » (tous les flics sont des b…)
# Ceci est un portrait SA-TI-RI-QUE ! Christophe va… « bien ». Si ce n’est qu’il a inspiré un compte Twitter parodique « Christophe Castagnette » plus vrai que nature…
1. Je m’appelle Hélène, chanson interprétée par Hélène Rollès et générique du feuilleton Hélène et les garçons.
2. Le Point, 25/10/17.
3. Brigitte, femme de flic, chanson du groupe de rap Ministère A.M.E.R.
4. Célèbre personnage du feuilleton susnommé.
5. L’Opinion, 19/04/19.
6. AFP, 11/07/17.
7. Le Midi Libre, 23/11/18.
8. Libre interprétation de l’acronyme sus-cité (voir *) et nom d’un compte Facebook.
9. Célèbre tag signifiant « tue le flic en toi ».
10. JDD, 02/06/18.
11. Un autre célèbre feuilleton sur l’adolescence.
12. La Provence, 03/12/15.
13. France Info, 17/10/18.
14. Gala, 10/01/18.
15. Paris-Match, 05/11/17.
16. LCI, 30/05/17.
17. Paris Match, 02/08/17.
18. Twitter d’Anaïs Lignier de Génération identitaire, 07/04/19.
19. AFP, 04/04/19.
20. Konbini, 02/08/17.
21. Libération, 18/09/17.
22. Le Monde, 10/08/17.
23. Marianne, 16/10/18.
24. JDD, 16/11/17.
25. Le Parisien, 18/11/17.
26. La Dépêche, 21/10/18.
27. BFM, 16/10/18.
28. Célèbre slogan né lors des manifestations des gilets jaunes.
29. La Canarde Sauvage, n°36/37, Ventôse 2018.
30. Public Sénat, 19/03/19.
31. Riposte laïque, 15/03/19.
32. Le Parisien, 14/03/19.
33. Déclaration à la presse, 15/03/19.
34. JDD, 23/03/19.