« Les enfants sont en 1ère ligne »
« Les enfants et leurs familles sont en 1ère ligne. Maman de 3 enfants, j’ai une pensée pour ce petit garçon qui a perdu la sienne dans l’effondrement rue d’Aubagne. Mais aussi pour tous ceux qui ont été délogés.
Il n’y a pas eu tant de problèmes de déscolarisation. Mais dès le début s’est posée la question des déplacements avec des enfants et leurs familles obligés de se lever à 6 heures du matin et de traverser tout Marseille parce que l’hébergement est d’un côté de la ville et l’école de l’autre. Une problématique encore plus saillante quand vous avez plusieurs enfants. Résultat : des mamans qui errent toute la journée en attendant de récupérer leurs enfants.
Aujourd’hui, on n’a pas encore de bilan chiffré, entre les familles qui ont réintégré leur appartement, celles qui ont accepté un hébergement temporaire ou de déménager. Mais en cette rentrée, ce qui m’interpelle, ce sont les familles qui sont encore en hôtel. Comment élever des enfants dans une chambre d’hôtel ? Comment faire pour qu’ils puissent dormir, jouer, s’amuser, faire leurs devoirs… Comment faire à manger quand il n’y a pas de cuisine ? Les familles se retrouvent isolées, éclatées.
Je connais une maman de 3 enfants malade à l’idée qu’ils fassent leur rentrée en étant encore à l’hôtel ! D’autant que ça n’est pas sans conséquence sur les résultats scolaires. En novembre, après avoir vécu longtemps dans un logement insalubre au cœur de Noailles, elle a dû quitter son appartement, près de la place de Rome, où elle et son mari avaient mis toutes leurs économies pour enfin s’offrir un lieu de vie sain. Mais leur immeuble a été frappé par un arrêté de péril.
Elle a passé 3 mois dans un hôtel loin de son lieu de vie, changé 6 fois de chambre. Et enfin obtenu un appart-hôtel près de Noailles où elle est depuis 6 mois. Mais aujourd’hui, après avoir eu 3 offres de logements temporaires qui ne lui semblaient pas adaptées, elle subit des pressions pour laisser la place à d’autres. Elle se sent incomprise. Car le traumatisme est tel qu’elle ne peut accepter un appartement dont la façade est fissurée ou trop éloigné des écoles.
En cette rentrée, elle est épuisée. Elle n’a pu récupérer les affaires pour ses enfants. En voyant d’autres accéder à un logement, elle se dit « pourquoi pas moi ? ». Alors elle compte sur ceux qui la soutiennent. Et espère que la mairie lui proposera un appartement digne. En attendant d’user de son droit au retour.
Propos recueillis par Sébastien Boistel