A Carpentras, des municipales incertaines
A neuf mois des municipales, il n’y a guère que l’extrême droite qui affiche l’unité à Carpentras. Hervé de Lepineau, future tête de liste FN, prépare son équipe. Membre de la Ligue du Sud, le parti de Jacques Bompard (député-maire d’Orange), il est aussi suppléant de Marion Maréchal-Le Pen à l’Assemblée. « Ma liste comptera des personnalités de droite, déçues de l’UMP », explique-t-il. Son programme ? « La méthode Bompard : un centre ville réhabilité, une maîtrise des dépenses sans hausse d’impôts et couper les subventions aux associations politisées. »
Le poids traditionnel de la droite à Carpentras oscille autour de 70 %. Mais divisée au second tour il y a 6 ans dans une quadrangulaire, la liste socialiste de Francis Adolphe l’avait emporté de 350 voix. « Il faut absolument qu’on arrive unis pour l’emporter », concède Jean-Michel Ferrand, le responsable départemental de l’UMP installé à Carpentras. Un sondage récemment réalisé par l’Ifop pour l’UMP, qu’il s’est empressé de faire fuiter, le plébisciterait. « Je n’y suis pas insensible. Mais j’irai seulement si les autres candidats ne se mettent pas d’accord », glose le dinosaure de 71 ans qui vise plutôt la présidence du Conseil général en 2015.
Les autres, ce sont Jean-Luc Becker, ancien élu municipal de 60 ans et pharmacien à succès, et Julien Aubert, jeune loup gaulliste convaincu, élu député il y a un an, qui se compare volontiers, avec son profil d’énarque, à Jacques Chirac. « J’irai quoi qu’il arrive, annonce d’emblée Becker. Avant de tacler son jeune collègue. Je travaille déjà au programme et contrairement à d’autres, je me consacrerai à plein temps à la mairie. » Aubert, qui n’est pas encore candidat, reste plus réservé : « Si Becker est désigné, je me rangerai derrière lui. » Tout en notant que la personnalité qui a le moins d’opinions négatives, lui-même, est celle qui a la plus grosse marge de progression…
En face, le maire sortant PS Francis Adolphe, pas encore déclaré, veut croire aux chances de la gauche. « Notre équipe a réveillé Carpentras, nous avons redynamisé le centre ville, recréé une mixité dans certaines zones », avance-t-il. Mais sa majorité s’est fissurée. Une élue communiste a récemment été évincée pour avoir voté contre le budget. L’année dernière, il a retiré les délégations de son 1er adjoint, l’avocat Farid Faryssy. « On a eu des désaccords politiques, ce dernier qui considère avoir fait élire le maire grâce au vote de la communauté maghrébine. François Adolphe n’est pas assez à gauche, il n’a pas fait assez pour les quartiers. » Pour l’heure, l’ex-1er adjoint n’envisage pas de liste dissidente « pour ne pas faire perdre la gauche ». Et le Front de gauche n’est pas assez solide ici pour partir en autonome…
Mais si la gauche s’étripe, c’est surtout au sujet de l’élection de Marion Maréchal-Le Pen. Toute la classe politique locale en parlait en « off », avant que L’Express ne sorte l’info du bois : la fédération du PS aurait passé un deal avec le FN pour maintenir Catherine Arkilovitch (PS) face à Maréchal, pour qu’elle soit élue, en échange du maintien d’une autre candidate FN dans la circonscription du premier fédéral PS – qui n’a finalement pas été élu (sic). Faryssy, soutien d’Arkilovitch, et Adolphe se sont expliqués violemment sur ce sujet dans le bureau du maire (une procédure judiciaire est en cours). « Certains au PS ont fait élire une Le Pen », accuse Francis Adolphe. « Arkilovitch n’a jamais reçu de pression, elle s’est maintenue toute seule, il n’y pas eu de deal, je ne l’aurais pas accepté, réplique Farid Faryssy. Le front républicain ça ne marche pas, certains électeurs en ont marre d’aller voter en se bouchant le nez. » C’est-à-dire pour Jean-Michel Ferrand, le candidat UMP défait, tendance droite populaire. Un climat qui ne peut que favoriser le « tous pourris » cher au Front National, grand gagnant de ce deal. S’il a existé.
Clément Chassot