La tête à Falco
Aucun dossier chaud n’est au programme ce vendredi 20 septembre, pourtant le conseil municipal de Toulon fait salle comble. A six mois des élections, « on est venu prendre le pouls », sourit un spectateur grisonnant. Le maire LR de Toulon, Hubert Falco, dont le portrait trône à même hauteur que celui de Macron, ouvre la séance. Elle dévie rapidement sur Chalucet, « grand quartier de la créativité et de la connaissance », projet phare du troisième mandat Falco prévu pour fin 2019.
« La ville se métamorphose et c’est ce qui vous dérange ! », attaque Falco. Il répond à une question d’Amaury Navarranne, conseiller régional et chef de file d’extrême droite récemment investi par le RN, sur l’ouverture retardée d’une partie du site. Guy Rebec élu d’opposition écologiste, candidat déclaré, a aussi droit à un tacle du maire. « Réglez vos problèmes dans votre parti. Quand vous serez investi, on en reparlera ! », enchaîne Falco. Et s’adressant à l’assemblée, agacé : « Ils sont maires avant d’être élus ! » La campagne n’a pas démarré que le ton est déjà donné… Et Falco manque de sérénité.
Mettre fin au système
Élu depuis 2001, toujours au premier tour, il devrait, sans surprise, briguer un quatrième mandat. Même si tactiquement, comme toujours, il attend le dernier moment pour se déclarer, ses adversaires potentiels ne voient pas « qui pourrait partir à sa place ». Mais depuis 2014 la donne a changé suite à la raclée que se sont pris les candidats LR varois aux législatives de 2017 battus par les marcheurs. Faute de dauphin, Falco reste la seule locomotive à pouvoir tirer le wagon Républicain qui déraille. S’il gagne, il passerait la main en cours de mandat à son deuxième adjoint Yannick Chenevard, conseiller régional. Un homme discret mais connaissant les dossiers.
« Pour un candidat non déclaré, il a montré une tension étonnante à mon égard », souligne Amaury Navarranne. S’il se murmure que Bruno Gollnisch, ancien député européen et ex-numéro 2 du FN, serait parachuté dans la rade comme il l’a été à Hyères en 2014, son ancien assistant parlementaire réfute l’idée. Navarranne affirme attendre encore un peu pour annoncer sa candidature. Le RN vient de lancer un questionnaire auprès des Toulonnais. De quoi construire un projet sur mesure quand on manque peut-être d’idées…
En mars dernier, Var-Matin a publié un sondage commandé à l’institut Elabe – les mauvaises langues murmurent que c’est à la demande du maire lui même – qui place l’édile vainqueur au premier tour avec 57 %, suivi de loin par le RN avec 15 %, puis par EELV avec 5,5 % et la marcheuse Cécile Muschotti – seule à s’être déclarée à ce jour – à seulement 5 %. « Communiste à La Seyne, socialiste à la Garde [ou elle est élue. Ndlr] et En Marche à Toulon [élue députée en 2017 en battant le LR Philippe Vitel. Ndlr] », aime à répéter Falco pour démontrer le manque de constance de la députée LREM. L’édile voit rouge aussi depuis que la marcheuse a placé comme premier de sa liste le Modem Pierre-Jacques Depallens, frère de Caroline Depallens, conseillère départementale LR et fidèle colistière de Falco.
S’unir ou pas
Avec la victoire des écologistes aux européennes, Guy Rebec (EELV) qui arriverait en troisième position selon le fameux sondage compte bien surfer sur la vague Jadot. Mais il veut rassembler « tous ceux pour qui l’écologie est importante, peu importe d’où ils viennent, citoyens compris, à partir du moment où ils partagent des valeurs de justice sociale et de développement démocratique ». Et de poursuivre : « A quoi servirait que l’on se promène avec un étendard qui dirait « On est de gauche » ? Qu’est-ce que les jeunes d’aujourd’hui ont connu de la gauche ? Ce qui préoccupe les gens au quotidien c’est le dérèglement climatique et comment ils vont pouvoir croûter. »
Si Guy Rebec n’envisage aucunement de s’allier avec LREM, Cécile Muschotti, elle, souhaite qu’au contraire, les alliances se fassent stratégiquement avant le premier tour : « Il s’agit d’une élection locale, et non d’une revanche sur les législatives. Il faut arrêter de laisser Toulon dans les mains d’un seul et même homme ! Arrêter de s’entêter et de vouloir faire de l’entre-soi mais au contraire avoir l’intelligence de construire ensemble. »
La salle du conseil s’est vidée. Il ne reste plus que le Ravi, auquel le maire a refusé de parler, et Guy Rebec. Falco lui serre la main et lui glisse à l’oreille : « Vous êtes mon premier adversaire. » L’édile accepte même une rencontre plus confidentielle avec l’élu d’opposition. Guy Rebec à notre intention : « Là, vous venez d’assister à un moment inédit, ça n’est jamais arrivé avant ! » Vraiment pas serein, disions-nous…