Nanterre d'écueil
Avec les livres, le hasard est rarement de mise. Après Mémoires d’Ex, passionnant travail documentaire sur ceux que le PC a exclus, nous voilà avec Nanterre, du bidonville à la cité de Victor Collet. Un des piliers de Manifesten, ce café-librairie du centre-ville marseillais aux allures de bourse du travail. Nanterre est une ville qui ne nous est pas totalement étrangère : on a visité sa prison, traversé sa fac et, le matin où Richard Durn a fait un carton en plein conseil municipal, recueilli la parole des survivants. Victor, lui, s’est penché sur l’histoire de ces baraques de tôle et de carton qui ont précédé les cités (notamment de transit) et rappelle les luttes oubliées de populations dont le traitement a oscillé entre sécuritaire, humanitaire et cette forme abâtardie de solidarité qu’Aimé Césaire désigna sous le nom de « fraternalisme ». Une histoire qui – en témoigne cette maison peinte qui fait penser à celle du peuple – résonne à Marseille : au prétexte d’une élection, le sinistre de l’Intérieur vient, comme ses prédécesseurs, fracturer une ville qui ne cesse, malgré les interventions de son collègue du logement, de tomber en morceaux. Il n’y a pas de hasard. Pour statuer sur l’expulsion du squat de St-Just, le juge a renvoyé l’affaire au 17 octobre. Presque 50 ans après le massacre des Algériens qui vit Papon et ses nervis inventer le terme « noyé par balle »…
Nanterre, du bidonville à la cité, par Victor Collet. Editions Agon, 433 pages, 22 euros.