De Hollandreou à Arnaud Stakanobourg
Notre nouveau président de la République se veut un président normal mais sa première normalité est de dire qu’il n’y a pas de solution sans relance économique. Notre grand ministre du Redressement productif se trouve de ce fait coincé entre la défense des emplois et du pouvoir d’achat et le pacte Merkozy que veut nous imposer « Hollandréou ». J’aimerais souffler quelques idées à mon camarade-ministre Montebourg qui semble en panne d’imagination ce qui l’oblige à dire des bêtises sur le nucléaire et le traité européen.
Arnaud, tu pourrais devenir, avec un peu de ce volontarisme politique qu’on te connaît, le tout premier ministre de la République de la sortie du productivisme et du consumérisme… Il te suffirait de dire que l’essentiel n’est pas de créer des emplois pour distribuer de l’argent afin de pouvoir acheter de mauvais produits conçus pour ne pas fonctionner longtemps mais de produire de belles choses solides pour ne plus avoir autant besoin de trimer toute sa vie. Arnaud, tu as suffisamment de bagout pour convaincre tes petits camarades du gouvernement écolo-socialiste qu’il ne s’agit plus de vouloir créer des emplois parce qu’ils sont rentables pour le grand capital mais seulement lorsqu’il y a des besoins insatisfaits. Je te promets Arnaud que si on travaille moins (32 heures tout de suite)… on travaillera tous. Et puis tu sais on pourrait être des chômeurs heureux avec un revenu social garanti…
« Arnaud, cesse de nous raconter des bobards ! »
Arnaud, si tu veux commencer à sortir, même rien qu’un peu, du productivisme, mets toi à l’école du Sud. Ce sont les pays pauvres qui nous font aujourd’hui des cadeaux conceptuels avec des notions comme le Buen Vivir (Bon vivre) à ne pas confondre avec le bien être au sens de la société occidentale, avec l’anti-extractivisme qui nous dit que ce n’est pas nous, le peuple, qui avions besoin de « toujours plus » d’énergie, mais les industries polluantes qui n’ont que le profit en tête et à la place du cœur. Camarade-ministre pourquoi n’échanges-tu pas tous les grands projets inutiles qu’on nous impose (aéroports, autoroutes, circuits automobiles, exploration des gaz de schiste, stades géants, etc) contre une politique qui aurait à cœur de réparer les produits plutôt que d’en faire des neufs ?
Arnaud, si tu veux commencer à sortir, même rien qu’un peu, du consumérisme stupide, pourquoi n’interdis-tu pas l’obsolescence programmée, pourquoi n’allonges-tu pas les délais légaux de garantie ? Pourquoi ne fixes-tu pas des objectifs de diminution des volumes d’emballages et d’usage des matières premières par branche d’activité ? Pourquoi ne rends-tu pas obligatoire aux constructeurs de laisser l’accès libre aux composants, pourquoi ne donnes-tu pas la priorité à la réparation avec mise en place de filières spécifiques par catégories de produits, en utilisant l’expertise d’associations existantes, en mettant en place des incitations tarifaires de type consignés, en interdisant les emballages immédiatement jetables, en prenant des mesures pour faciliter la vente en vrac, en remettant des bons d’achat à la hauteur de la valeur de la matière première rapportée lorsque l’usager d’un produit contribuera à son recyclage ? Comment peux-tu accepter que seulement 7 % de la matière première qui a servi à fabriquer un produit se retrouve dans celui-ci ? Comment peux-tu accepter que 99 % des ressources prélevées sur Dame-Nature deviennent des déchets en moins de 42 jours ?
Mon bon Arnaud, je te propose de devenir le Père du pouvoir de vivre plutôt que le stakhanoviste du pouvoir d’achat et des emplois coûte que coûte… Tu vas me dire, oui, mais le pouvoir d’achat. Mais bon dieu, Arnaud si ma machine à laver dure vingt ans au lieu de cinq actuellement… tu ne vois pas que tu augmentes sacrément mon pouvoir d’achat tout en me permettant de faire autre chose de ma vie que d’être alternativement un forçat du travail et de la consommation. Qu’est-ce que tu dis Arnaud ? Que tu ne peux pas faire grand chose ? Qu’il y a les lois économiques ? Ecoute Arnaud, je te propose un deal. La gauche en 1981 avait su libérer de nouveaux territoires comme les radios libres ou plus de démocratie pour les salariés dans les entreprises avec les lois Auroux. Je te supplie de quémander au prochain Conseil des Sinistres qu’il libère de nouveaux territoires pour nous permettre d’expérimenter d’autres façons de vivre, pour que nous puissions multiplier les alternatives.
Arnaud, cesse de nous raconter des bobards. Cesse de nous faire croire à une réinsertion possible des millions de naufragés au sein de ce système qui fonctionne à l’exclusion. Arnaud, on ne te demande pas de devenir le ministre de la désindustrialisation, on te demande juste de cesser de dire des bêtises sur la beauté du nucléaire (énergie d’avenir) et le traité Merkozy.
Paul Ariès