Moi, Francis Pizzorno, « le grimpeur de col »

novembre 2011
Mauvaise donne pour Francis Pizzorno et le groupe qui porte son nom. Dans l’affaire du déversement dans la décharge de Bagnols-en-Forêt (83) de plus de 88 000 tonnes de mâchefers issus de l’incinérateur d’Antibes, sans oublier quelques autres de déchets non autorisés (boues toxiques, frigos, coques de bateaux, batteries, peintures, etc.), qui lui a rapporté la bagatelle de 1,8 millions d’euros entre 2004 et 2008, le parquet de Draguignan a eu la main lourde. Il a requis, le 8 octobre, une peine de 100 000 euros à l’encontre de Pizzorno Environnement et de chacune de ses deux filiales impliquées (SMA et Sovatram) et 50 000 euros à l’encontre de Valomed (Veolia), exploitante de l’incinérateur. Pire : le ministère public a également requis 10 000 euros d’amende à l’encontre de dirigeants, anciens ou actuels, de ces sociétés. Encore plus odieux : oublié lors de ce procès, Francis Pizzorno, aura droit à une audience pour lui tout seul en mars prochain. Décidément, les poubelles en Paca c’est que des problèmes ! Pour en savoir plus, voici le portrait satirique de Francis Pizzorno publié en octobre 2011 dans le Ravi.

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Fanatique de vélo, le papy varois spécialisé dans le traitement des montagnes de déchets se voit poursuivi en justice par une nouvelle et tenace équipe de rouleurs.

« Mesdames et messieurs, c’est à un moment attendu et historique que nous assistons aujourd’hui dans ce Tour de France du déchet : l’équipe Pizzorno environnement, menée par son célèbre grimpeur Francis Pizzorno, est en passe de remporter l’étape varoise !

Cette victoire était attendue : l’équipe joue à domicile puisqu’elle est née dans le Var en 1974 et s’y trouve en position dominante dans le secteur de la propreté urbaine, de la collecte et du traitement des déchets. De dimension plus modeste que ses concurrentes, l’équipe Pizzorno n’est que quatrième au classement général derrière les grosses machines comme Veolia ou Suez. Mais la petite équipe de grimpeurs affiche tout de même en 2010 un taux de croissance de 13 % à 190 millions de chiffre d’affaires, dont 45 millions pour le traitement des déchets (+ 10 %) (1) alors que… OH !! INCROYABLE !!! Une autre équipe se détache du peloton pour mordre les mollets des Pizzorno !!! Quelle audace, alors que Pizzorno court pratiquement à domicile ici… Je n’arrive pas à les identifier, le maillot est noir et bleu, serait-ce… SI !!! L’équipe Justice-gendarmerie (JG) !!

« 90 000 tonnes de mâchefers enfouies en toute illégalité… »

Ah il faut dire qu’ils avaient fourbi des armes pour préparer cette attaque : un total de 34 000 euros d’amendes en 2010 pour un dépassement de 230 000 tonnes dans un casier de décharge du Var, autorisé pour un million de tonnes seulement. On se souvient à l’époque des déclarations du coureur Nicolas Kerfridin, procureur dans l’équipe JG : « Le législateur a mis en place des exigences draconiennes […], ce n’est pas pour que l’on s’arrange sur le terrain et que l’on fasse autrement » (2). Les JG avaient remis ça lors du Tour suivant : un an de prison ferme pour le gérant d’un centre de tri du Muy et 50 000 euros d’amende pour le groupe après un accident qui avait coûté la vie à une employée (3). L’équipe Pizzorno avait invoqué l’erreur humaine de deux de ses employés. Mais voilà que le grimpeur en chef, Francis Pizzorno, tente l’échappée alors que ses co-équipiers essaient de contenir l’attaque de l’équipe JG ! Oh comme c’est finement joué !!!

Ah ça va peut-être être dur quand même là, parce que les JG ont l’air très motivés, ils talonnent Pizzorno, on les entend le héler, ils parlent de 90 000 tonnes de mâchefers sorties de l’incinérateur d’Antibes et qui auraient été enfouies en douce et en toute illégalité de 2004 à 2007 dans la décharge de Bagnols-en-Forêt, pour un gain de 25 millions d’euros (4). Ils parlent aussi d’autres déchets industriels et de boues d’épuration toxiques… Francis Pizzorno se bouche les oreilles avec son kit mains libres, il chante sur tous les tons que ces articles s’appuient sur « des arguments faux et diffamatoires » et se réserve « le cas échéant, le droit de poursuivre ceux qui mettent en cause sa probité » (5).

« Le credo officiel Pizzorno : propreté, respect, organisation, sécurité… »

Il faut dire que Pizzorno a quand même une excellente réputation ici, hein, tous les Varois vous le diront : ils financent les courses de vélo, des concours boulistes, des clubs de foot et de handball. Rien à voir avec certains confrères des Bouches-du-Rhône qui attendent d’être convoqués par la justice pour apparaître à la une des journaux. Et puis notre coureur à la mèche d’acier et au poing souvent posé sous le menton ou la lèvre inférieure commence à être connu à l’international, « de l’Ukraine à l’Afrique » (6), un marché où le groupe veut réaliser « la moitié de son chiffre d’affaires » et emploie déjà les deux tiers de ses 6 000 salariés (7).

L’équipe au maillot bleu à dauphins se fait un point d’honneur de respecter la devise de Saint-Exupéry : « Nous n’héritons pas la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants » (8). Lors de la précédente étape, nous avons pu ainsi découvrir dans la presse locale les bienfaits de la gestion RH de l’équipe, qui propose à ses coureurs des cours de taekwondo, sophrologie ou expression corporelle, pour qu’ils deviennent « non seulement écocitoyens, mais aussi des ambassadeurs des valeurs que nous véhiculons à l’extérieur : la propreté, le respect, l’organisation et la sécurité » (9). Ah, le leader de l’équipe PJ réplique que pour les valeurs véhiculées à l’intérieur, le tribunal tranchera. Effectivement la lutte entre PJ et Pizzorno semble très serrée, il faudra peut-être recourir à la photo-finish sur la ligne de OH !!!! Contre-attaque fulgurante de l’équipe Pizzorno !! Il semble qu’elle bénéficie du soutien inattendu de certains coureurs des équipes Préfecture, Syndicats et Élus locaux. Stratégie très fine, là, les coureurs se portent à hauteur de l’équipe PJ, on voit que ça discute ferme, on ne capte que quelques bribes de conversation : « emploi local », « risque de grève des poubelles comme en 2010 », « passage en force du préfet pour tordre le bras aux communes récalcitrantes »…

Ah là là, on sent que l’équipe PJ s’interroge sur la stratégie à adopter et, pendant ce temps, l’équipe Pizzorno regagne peu à peu du terrain ! Ah c’est serré, c’est serré. Il faudrait quand même qu’un vainqueur se dégage de cette belle mêlée là, ce serait dommage de devoir trancher cette empoignade sur tapis vert… »

Pouleudor

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