L’affaire Gaudin

août 2011

enquete_85.jpgDans le tumulte politico-judiciaire marseillais, le maire est le gardien du temple de la continuité. Et de l’immobilisme ? Enquête sur un système…

Jean-Claude Gaudin est-il un homme fini ? À Marseille, dans sa propre majorité, beaucoup s’impatientent pour lui succéder en 2014. Le député Renaud Muselier, dauphin autoproclamé, réclame en vain d’être officiellement adoubé. Guy Teissier, le maire UMP du 5e secteur, est entré ouvertement en dissidence et mène au conseil municipal une opposition virile. Pour son 3e mandat – celui de trop ? – le maire doit cogérer la ville avec le parti socialiste qui s’est emparé à la hussarde de l’agglomération, Marseille Provence Métropole.

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, des personnalités éclipsent désormais Jean-Claude Gaudin, 71 ans, qui a longtemps régné presque sans partage sur la droite régionale : Hubert Falco, 64 ans, le maire UMP le mieux réélu dans une grande ville de France ; Christian Estrosi, 55 ans, incarnation « bling-bling » du Sarkozisme ; Thierry Mariani, 52 ans, porte-drapeau de la droite « populaire » et décomplexée. La capitale de la région, qui n’est plus représentée au gouvernement depuis six ans, s’est éloignée du centre du jeu politique.

Pourquoi alors consacrer une « grosse enquête » à Gaudin lorsqu’on ne s’appelle pas Historia ou France antiquités magazine ? C’est que, même politiquement affaibli, le truculent sénateur n’est toujours pas pressé de prendre sa retraite. À la Haute assemblée justement, celle qu’il rêvait de présider pour finir sa carrière, il vient de se faire élire président du groupe UMP : un poste stratégique pour éviter que la 2e chambre ne bascule à gauche en septembre.

À Marseille, le « gaudinisme », en place depuis 16 ans, est toujours d’actualité. Et le maire n’a réellement pas renoncé à l’éventualité de postuler pour un 4e mandat. À quoi ressemble le système de gouvernance de la deuxième ville de France ? Curieusement, à celui instauré après-guerre par un autre homme, Gaston Defferre, auprès duquel « Jean-Claude » a débuté : clientélisme, communautarisme, ville clivée géographiquement avec des quartiers Nord paupérisés… Tout cela ne nous rajeunit pas et ne fait pas souffler le mistral du renouveau !

Une tempête politico-judiciaire ébranle pourtant les équilibres historiques marseillais. Les déboires qui frappent Alexandre Guérini, et par ricochet son frère Jean-Noël, le patron du conseil général, déstabilisent en profondeur les socialistes locaux. Curieusement, l’affaire Guérini ne fait pas l’affaire de Gaudin – même si elle facilitera la tâche du candidat UMP aux futures municipales –, comme s’il veillait avant tout à ce que rien ne bouge ou qu’il craignait de recevoir quelques éclaboussures.

Le maire de Marseille ne prise guère les juges fouineurs, leurs méthodes, leurs enquêtes indiscrètes. Par exemple, celle du juge Dorcet, que le Ravi a pu parcourir, et qui révèle que Jean-Claude Gaudin a fait table commune, en 2010, avec un éminent représentant du milieu marseillais, Michel Campanella, fiché au grand banditisme et aujourd’hui incarcéré à Luynes (13), au côté d’Alexandre Guérini. Si on ne peut même plus déjeuner en paix…

Michel Gairaud

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