Raison n°2 Décider où Paca crèche
Paca est-il vraiment devenu un fief de droite et d’extrême-droite ? Cette région est le lieu d’un paradoxe intéressant. Les grandes villes y sont gouvernées par la droite, qui emporte aussi toutes les élections nationales, mais le Conseil régional et trois Conseils généraux sont dirigés par la gauche. Depuis le début des années 80, on assiste à une droitisation de la région. Elle touche plus les villes que les campagnes. C’est l’inverse au national où la gauche obtient ses meilleurs résultats dans les centres-villes. Cette droitisation est liée aux mouvements d’urbanisations dus à la forte attractivité de Paca. La région attire depuis 30 ans des personnes qui votent plus à droite que la moyenne. La gauche résiste mieux dans les campagnes où, inertie aidant, les changements sont toujours plus lents.
Le retour dans les centres- villes de « bobos » progressistes et écolos n’a pas d’effets ? Cette catégorie, avec ses demandes spécifiques d’équipements culturels et de transports publics, existe bel et bien. Mais cet arbre-là ne doit pas cacher la forêt que constitue l’arrivée massive de cadres supérieurs, actifs ou retraités, qui votent plus à droite. La stratégie « développementaliste », défendue aussi bien à droite qu’à gauche, n’est finalement pas une affaire pour la gauche. En développant des pôles comme le Rousset (13) ou Sophia Antipolis (06), alors qu’elle croyait y trouver une réserve de voix, elle a plutôt scié la branche sur laquelle elle est assise.
« La gauche scie la branche sur laquelle elle est assise »
Comment expliquer alors la bonne résistance dans les urnes et dans les sondages d’un Michel Vauzelle ? Les triangulaires avec le Front national l’ont bien aidé… Le prochain scrutin s’inscrit d’abord dans un contexte national favorable à la gauche, celui d’une élection intermédiaire marquée par un vote sanction à l’égard du gouvernement. La droite est partie perdante en Paca en choisissant Thierry Mariani, qui n’est pas le plus charismatique candidat. Ensuite, le bilan de Michel Vauzelle est plutôt honorable. Il s’appuie sur un réseau d’élus locaux bien implantés, en particulier dans l’arrière pays et les zones rurales. 13 ans de gestion lui ont permis, pour le meilleur, de s’assurer un ancrage terrorial en développant des projets, pour le pire parfois, d’assurer des pratiques clientélistes comme dans les quartiers nord de Marseille. Il a eu l’intelligence de distribuer des aides y compris dans des zones dirigées par la droite. Il n’a pas ainsi donné l’impression que le Conseil régional n’a servi qu’à une partie du territoire.
Quelles sont, au final, les grandes lignes de l’organisation territoriale du vote en Paca ? Jusque dans les années 80, la logique historique déterminante était une division Est/Ouest : l’Est et le pays Niçois très à droite et l’Ouest, depuis le 19ème siècle, ancré à gauche. Cette logique n’a pas disparu mais elle est, peu à peu, remplacée par une autre liée à la distance du littoral. Le vote d’extrême droite se concentre sur un bandeau étroit le long de la côte et de la vallée du Rhône. Le vote à droite s’étend lui aussi au long de la côte mais sur un bandeau un peu plus large. La gauche garde des zones fortes dans l’arrière pays.
Paca n’en a pas fini avec l’extrême droite ? Il est toujours difficile de faire un pronostic sur le vote FN. Paca reste un de ses bastions. Pourtant, l’extrême droite y a perdu du terrain plus tôt que dans le reste de la France. Dès 2002, le centre de gravité du vote pour le FN s’est déplacé du sud vers le nord. En Paca, ce vote devient de plus en plus populaire. En clair, sa frange la plus « petite bourgeoise » s’est ralliée à Nicolas Sarkozy. C’est la grande inconnue du scrutin des 14 et 21 mars. Que vont devenir les électeurs qui votaient FN et s’en étaient détourné en 2007 au profit de l’UMP ? Il y a aussi la question de l’abstention. Elle reste le 1er vote, en particulier dans les couches populaires et les zones urbaines sensibles. Et sur ce point, Paca ne fait pas exception…
Propos recueillis par M.G.