La SNCF fait détester le TER

juin 2010
Trains en retard ou supprimés, moyens à minima, la SNCF est fustigée pour son exploitation des TER

« Il y a de plus en plus de trains vides, les gens reprennent leur voiture. » Selon Claude Jullien, président régional de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut), après l’embellie du début du 21ème siècle, certains habitants de Paca recommencent à bouder le TER.

Sur l’ensemble du réseau, la fréquentation est pourtant en hausse depuis 2009 (de 5,47 %, la plus faible de France). Par contre, les retards et les annulations à répétition malmènent certaines lignes, Cannes-Grasse ou Marseille-Toulon par exemple. Avec 16 000 trains supprimés en 2009, (+ 10 % par rapport à 2008), Paca est même championne de France ! 4 500 le sont pour raisons internes à la SNCF. Le double de 2008 ! Associations d’usagers, syndicats et Région dénoncent une gestion à flux tendue du personnel et du matériel, résultat d’objectifs financiers imposés par l’Etat. Chargé d’étude au cabinet Eureca, Clément Soulas pointe également un problème intrinsèque à l’entreprise publique : « Plus il y a de trafic, plus c’est difficile pour la SNCF. Donc moins, il y en a, mieux c’est. Et c’est encore mieux s’il y a peu de voyageurs. » La politique de la Région en faveur du TER doit considérablement la gêner…

Olivier Monnot, directeur délégué TER-SNCF en Paca, préfère de son côté parler d’une « situation complexe » : « Vu les problèmes, je n’attends pas de louanges. Aix-Marseille fonctionne très bien parce que seuls des TER y roulent (1). D’autres lignes, comme Marseille-Toulon, beaucoup moins parce qu’il y a seulement deux voies pour faire rouler TGV, TER et fret. » Et d’insister, lyrique : « Le train, c’est comme le pianiste, on a vite envie de lui tirer dessus. Mais en Paca, la partition est difficile et le piano est vieux. »

_sncf.jpg

« Moins il y a de trafic et de voyageurs, mieux c’est pour la SNCF ! »

Si la vétusté du réseau et des infrastructures est réelle, la SNCF est loin d’être exempte de tout reproche. Jusqu’à la régionalisation, l’entreprise publique s’est contentée de gérer son patrimoine. Exemple : décidée il y a deux décennies, le doublement de la ligne Aix-Marseille n’a vu le jour que fin 2008 ! Et malgré les effets d’annonce des Plans Etat-Région, la SNCF a toujours du mal à mettre la main à la poche quand il s’agit de TER. Jean-Philippe Isnard, président de l’Association pour le développement des transports publics, fulmine : « La SNCF privilégie le TGV. Sur la ligne Cannes-Grasse, il nous arrive de patienter en gare pour les laisser passer ! »

Autre reproche : la rupture du dialogue social dans l’entreprise. En 2009, 9 000 trains ont été supprimés pour grève. Les syndicats revendiquent des postes et des moyens supplémentaires. « Les cheminots sont dans leur rôle. Mais on augmente nos effectifs chaque année (2). Et je remarque que dans le Sud, le dialogue social est très pétillant. Les mêmes difficultés se retrouvent au Port autonome ou dans les transports publics », botte en touche Olivier Monnot. « Ils ne se parlent plus, assure de son côté Claude Jullien. Résultat, la direction de la SNCF n’est plus capable de commander des objectifs. »

Fin janvier, l’entreprise publique a annoncé avoir trouvé la solution à tous ses problèmes : moderniser l’information des usagers. Difficile de croire que ça suffise à faire préférer le TER aux Provençaux et aux Azuréens.

Jean-François Poupelin

Imprimer