Moi, Nicolas Sarkozy, « en vacance(s) de la République »

septembre 2012
Les vacances, c'est déjà loin ! Heureusement, il nous reste les cartes postales. le Ravi a pu intercepter une particulièrement longue que Nicolas Sarkozy a envoyée depuis le Cap-Nègre, dans la résidence varoise de sa belle-famille, à Marine Le Pen (1).

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J’espère que cette lettre échappera à Hollande qui, paraît-il, m’en veut encore d’avoir détruit tout le courrier qu’il avait reçu à l’Elysée (2). Fallait bien que je m’occupe, moi… J’ai commencé mon quinquennat avec un SMS : « Si tu reviens, j’annule tout. » (3) Et je l’ai fini sur ce cri du cœur : « Si j’avais pu, je serais parti » (4) au lendemain de ma défaite. Des conneries : tu te rends compte qu’aujourd’hui, je suis un justiciable comme les autres ! Je vais finir en taule, c’est sûr ! Mais pourquoi j’ai fait mon Jospin à la Mutualité, en expliquant que j’allais « redevenir un Français parmi les Français » (5) ?

« Nous sommes des gens modestes. »

Bon, avec environ 20 000 euros par mois (6), en comptant les 6000 euros d’indemnités, le droit de siéger au Conseil Constitutionnel et les avantages en nature, faut pas charrier. Mais, pour le reste, moi et le pékin moyen, c’est pareil. La preuve ? Crise oblige, je passe les vacances dans la belle-famille. Certes, c’est au Cap Nègre, mais quand même ! « Nous sommes des gens modestes », assure Carla (7).

On est dans sa villa. Comme chaque été. Tu devrais venir. C’est vrai que le nom de la localité a de quoi donner des suées. Mais franchement, ici, tu pourrais demander l’asile politique : « Bienvenue à Facho-land » (8) ! Demande à la petite Marion, à Bompard de la Ligue du Sud ou à l’autre Collard ! Ici, on est entre nous. On se sent bien. Enfin bien…

Quand j’avais supprimé la pub sur France Télévisions, j’étais tombé sur un journaliste de l’Huma qui, visiblement inspiré après que je lui ai serré la pogne, m’avait demandé comment ça allait. « Pas trop mal… », avais-je répondu (9), goguenard. Qu’est-ce que je devrais dire aujourd’hui ? Tout simplement que je me fais chier comme un rat mort ! Chirac s’y est pas trompé : pour se venger d’avoir été obligé par Bernadette de voter pour moi par procuration (10), il m’a envoyé un pack de Corona. Avec un post-it : « Bienvenue au club. »

Fini les yachts de Bolloré ou les jets de Lagardère, les patrons du « rottweiler », comme dirait Lionnel Luca (11). Aujourd’hui, ils ne me prêteraient même pas une bouée ou un parachute. Remarque, c’est plutôt d’une corde dont j’aurais besoin. Ou d’un bâillon. Carla commence à me les briser menu à chercher des rimes en « iste » pour dire du mal de la presse dans son prochain album (12). Et puis je dois m’occuper du bébé, maintenant. Fini la nounou de l’Elysée ! J’ai quand même gardé une dizaine de flics (13) pour mon footing. Je me demande si c’est pour me protéger ou m’empêcher de me faire la belle mais à 700 000 euros par an, c’est fou comme ils sont affectueux.

Alors que les journalistes, c’est autre chose. J’ose plus me baigner ! Parce que, ce coup-ci, mes bourrelets, z’auront plus droit à un coup de Photoshop (14). Regarde le nombre d’articles sur la levée de mon immunité ! J’ai même été obligé de livrer mon agenda ! J’aurais peut-être mieux fait de rester au Maroc. Mais qu’est-ce que je me faisais chier ! J’ai 57 ans, moi. Ca fait trente ans que j’en rêvais, de ce job. Et là, au bout de cinq ans, viré comme un malpropre.

Pas question de jouer les baveux en attendant la retraite ! Ni de bosser pour Bouygues (15). Après avoir coulé le « France », j’vais pas grimper dans le « Titanic ». Même Laurence Ferrari l’a compris. Non, ce que je veux, c’est comme toi. C’est le pouvoir. Alors viens ! « Ensemble, tout est possible ! » (16) T’as remarqué, d’ailleurs, que dans mon dernier slogan – « La France forte » – quand t’enlève « FN », ça fait « la race forte » ?

Une idée de Patrick Buisson, tu sais, l’ancien de Minute, mon conseiller. Il a raison ! Faut arrêter de tortiller du cul pour chier droit. Le pays des droits de l’homme, tu parles ! Faudrait pas oublier «  qu’à l’abri des bombes, les Français criaient « vive Pétain », qu’ils étaient bien planqués à Londres, qu’y avait pas beaucoup de Jean Moulin » (17). Ils me font marrer, à l’UMP, à jouer les faux-derches avec le FN.

« J’ai besoin de remettre à jour mon GPS. »

Au moins, dans le coin, la droite, elle y va franco ! Regarde Maryse Joissains, la Morano d’Aix-en-Provence, qui assure avoir « toujours défendu les valeurs » du FN (18). Ou Estrosi et son arrêté contre les « mariages trop bruyants » (19). Sans parler du boucher des Saintes-Maries de la Mer, André Chassain, qui s’est désisté au profit du FN pour faire battre Vauzelle (20). Comme disait Delon, qui doit être enterré dans le coin, « l’extrême-droite, c’est quand même la droite » (21).

Ok, à part pour Estrosi, ça ne s’est pas très bien passé pour les autres. C’est normal : « Dès que je ne suis plus là, c’est le bordel » (22) Regarde ces abrutis qui viennent de créer une association des amis de Nicolas Sarkozy alors qu’il en existait déjà une depuis 2004 (23). Ou Raoult qui veut m’inscrire pour le prix Nobel de la Paix (24)… Oublie tout ça ! Comme je l’ai dit, tu es « compatible avec la République » (25). Imagine : l’Elysée à Neuilly, le Sénat à Vichy et l’Assemblée Nazionale à Saint-Cloud. Avec une présidence bicéphale, fini la schizophrénie ! Ton mec hériterait de Matignon, Jean-Marie des anciens combattants et la petite Marion de la Jeunesse. Sinon, pour l’ouverture, Zemmour serait à l’Information, Gollnisch à l’Education et Collard à la Justice. Pour le gros œuvre ? Guéant ministre de l’Intérieur ET des Transports. Quant à Hortefeux, il s’occuperait, comme d’hab’, du Travail, de la Famille et de la Patrie.

Ach, je m’emporte ! J’ai même des hallucinations. Carlita chantait du Tino Rossi : « Marinellaaaa ! » Comment, Marine est là ? En me voyant bondir, ce qui me sert d’ex-première dame de France a grimacé d’incompréhension. Mais sa gauchiste de sœur, elle, a bien compris : « Ça te ferait bander que la mère Le Pen soit là, hein ? Va falloir te consoler avec la petite fille. Ici, y a que Maréchal et nous, voilà… »

J’ai pété les plombs : « Laissez-moi respirer ! J’ai besoin de remettre à jour les coordonnées de mon GPS. Je veux une vie normale » (26). Enfin, normale… « Je ne pense pas que le général de Gaulle, François Mitterrand, Valéry Giscard d’Estaing, Jacques Chirac, Georges Pompidou, c’était à proprement parler des hommes normaux » (27) Moi, c’est pareil. Mais si j’avais un « vrai travail », ce serait la « Fête » (28) ! Alors viens me libérer, Marine ! En plus, dans le coin, c’est pas les paras qui manquent. Comme le petit Corse (ou le grand Charles), on va marcher sur la capitale. De toute manière, pour moi, c’est ça ou la taule !

J’attends de tes nouvelles. Au fait, t’as remarqué, cette carte postale, j’l’ai écrite moi-même. Buisson m’avait proposé un coup de main. Je lui ai dit que j’avais pas besoin de nègre. Il m’a répondu que j’avais passé un cap. On a bien rigolé.

« Je t’embrasse bien faf. »   (29)

N.S.

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