Raison n°4 Faire plaisir au président

juin 2010
Nicolas Sarkozy a exhorté l'UMP à faire des régionales un enjeu national. Et si les électeurs le prenaient au mot ? Pas sûr que la majorité présidentielle y gagne...

La posture présidentielle à la François Mitterand, celle du grand homme au dessus de la mêlée, très peu pour Nicolas Sarkozy ! C’est le chef de l’Etat qui, dès novembre dernier devant le conseil national de l’UMP, a lancé la campagne des régionales en exhortant cadres et militants à défendre ouvertement l’action du gouvernement dans cette bataille électorale. Soldat discipliné, Thierry Mariani a mis les points sur les « i », fin janvier, en inaugurant sa permanence régionale : « Je fais campagne en soutenant et en revendiquant le bilan de ce gouvernement (…) Contrairement à Michel Vauzelle, je souhaite faire en sorte que demain les efforts de l’Etat puissent donner leur pleine mesure en Paca. » C’est pain bénit pour le président sortant du Conseil régional qui invite justement ses électeurs à « résister ». « Nous appelons en effet à combattre le désordre économique et social engendré par la politique de Sarkozy, confirme Christophe Castaner, tête de liste dans les Alpes-de-Haute-Provence. Mais aussi à résister aux effets négatifs de la société mondialisée. »

Taper sur Sarkozy, oui mais pas seulement. « Nous avons aussi un bilan à défendre et un projet à poursuivre, précise Christophe Castaner. En votant pour Vauzelle, les électeurs le feront aussi contre Sarkozy. C’est le double effet kiss cool : frais au début et frais à la fin. » François Bayrou lors des Européennes a mesuré, à ses dépens, que transformer une élection intermédiaire en référendum anti-sarko comporte parfois des risques. « Bayrou a eu raison de nationaliser le débat aux Européennes, juge Christophe Madrolle, directeur de campagne de Catherine Levraud, tête de liste du Modem. Mais nous nous sommes attachés cette fois-ci à mettre en place un programme très régional car c’est pour nous le bon échelon. » Europe Ecologie recherche le même équilibre : « pour mettre en place un contre-pouvoir aux logiques sarkozystes, nous mettons en avant des alternatives locales, explique Sébastien Barles, directeur de campagne de Laurence Vichnievsky. La région est le niveau pertinent pour la mutation écologique de la société. »

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« C’est le double effet kiss cool »

Côté UMP, l’équation est encore plus complexe. « Une élection régionale n’a rien à voir avec un enjeu national, s’insurge Arlette Fructus. Mais on ne peut pas faire non plus une disjonction complète. » Candidate, avec l’étiquette parti radical, en deuxième position sur la liste Mariani dans les Bouches-du-Rhône, elle tente de renvoyer la balle à l’adversaire : « Lorsque Michel Vauzelle dit qu’il entre en résistance, c’est dramatique. Depuis douze ans, il fait systématiquement une contre-politique gouvernementale. Résultat : notre région est première pour l’endettement et dernière pour l’investissement. » La meilleur défense, c’est l’attaque ! Et Arlette Fructus de choisir l’exemple des pôles de compétitivité : « au lieu de les aider à se développer, la Région a mis en place un système concurrent, les « Prides ». Je ne sais même pas ce qu’il y a là dedans, de l’économie solidaire je crois… »

Alors ? Sondage grandeur nature anti-Sarko ou scrutin régional ? « Il ne s’agit pas de faire seulement de l’anti-sarkozysme, cela ne suffit pas à définir un projet, pense lui aussi Pierre Dharréville, directeur de campagne de Jean-Marc Coppola, tête de liste du Front de gauche. Ne cédons pas à la tendance de trop bi-polariser les choses. La politique n’est pas en noir et blanc. Il y a plusieurs possibilités. L’élection régionale ne va pas changer le paysage national mais va soit servir à mettre des digues, soit libérer les grandes eaux sarkozystes. Tout en cherchant à répondre à la question régionale, nous nous demandons comment reconstruire autrement la société. » Affirmant ne pas négliger également les enjeux locaux, Pierre Godard, tête de liste du NPA ne cache pas très vite sa volonté d’en découdre : « 1 salarié sur 4 en Paca gagne moins de 826 euros, le seuil de pauvreté. C’est bien le bilan de la redistribution des richesses à la sauce Sarko ! » Difficile de faire abstraction longtemps de l’omni-président…

M. G.

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